Une guerre aux racines soviétiques
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Le 2 avril dernier, l'armée azérie bombardait la région du Haut-Karabakh et notamment la ville de Talich, située à la frontière entre les deux entités. Plus de vingt ans après la signature du cessez-le-feu mettant fin à la première guerre du Haut-Karabakh (1991-1994) et même si la tension n'était jamais vraiment redescendue, une telle offensive marque une nouvelle étape dans l'affrontement entre l'Azerbaïdjan et l'enclave du Haut-Karabakh soutenue par l'Arménie.
Pour comprendre les origines de ce conflit, il faut remonter presque un siècle en arrière lorsque Staline, en 1923, décide d'inclure la province du Haut-Karabakh - pourtant majoritairement peuplée d'Arméniens - dans le territoire de l'Azerbaïdjan, alors dans l'URSS. Si Moscou parvient à maintenir l’ordre, quitte à recourir à des méthodes répressives étouffant la revendication permanente du Haut-Karabagh souhaitant être rattaché à la république socialiste soviétique d’Arménie, les tensions ethniques prennent de l’ampleur après les pogroms de 1988 contre les Arméniens dans la ville azerbaïdjanaise de Soumgaït. La même année, le parlement de la région autonome du Haut-Karabakh déclare sa sécession vis-à-vis de l'Azerbaïdjan et voit arriver de nombreux Arméniens fuyant les pogroms azéris. En 1991, Arménie et Azerbaïdjan déclarent leur indépendance et Bakou (capitale de l'Azerbaïdjan) supprime le statut d'autonomie du Haut-Karabakh qui, en réponse, se proclame lui aussi indépendant. Une guerre meurtrière (25.000 morts) éclate alors entre Arméniens et Azéris et débouche sur une victoire de l'Arménie qui permet au Haut-Karabakh d'occuper 13% du territoire azéri. Un armistice est signé à Moscou en mai 1994 mais aucun accord de paix n'est signé.
Parrainées depuis 1994 par le groupe de Minsk - France, Russie, États-Unis - de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), les négociations sur le statut de l’enclave traînent en longueur depuis, ce qui s’explique notamment par l’intransigeance arménienne qui laisse perdurer l’état d’occupation de territoires pourtant internationalement reconnus comme appartenant à l’Azerbaïdjan.
Pour comprendre les origines de ce conflit, il faut remonter presque un siècle en arrière lorsque Staline, en 1923, décide d'inclure la province du Haut-Karabakh - pourtant majoritairement peuplée d'Arméniens - dans le territoire de l'Azerbaïdjan, alors dans l'URSS. Si Moscou parvient à maintenir l’ordre, quitte à recourir à des méthodes répressives étouffant la revendication permanente du Haut-Karabagh souhaitant être rattaché à la république socialiste soviétique d’Arménie, les tensions ethniques prennent de l’ampleur après les pogroms de 1988 contre les Arméniens dans la ville azerbaïdjanaise de Soumgaït. La même année, le parlement de la région autonome du Haut-Karabakh déclare sa sécession vis-à-vis de l'Azerbaïdjan et voit arriver de nombreux Arméniens fuyant les pogroms azéris. En 1991, Arménie et Azerbaïdjan déclarent leur indépendance et Bakou (capitale de l'Azerbaïdjan) supprime le statut d'autonomie du Haut-Karabakh qui, en réponse, se proclame lui aussi indépendant. Une guerre meurtrière (25.000 morts) éclate alors entre Arméniens et Azéris et débouche sur une victoire de l'Arménie qui permet au Haut-Karabakh d'occuper 13% du territoire azéri. Un armistice est signé à Moscou en mai 1994 mais aucun accord de paix n'est signé.
Parrainées depuis 1994 par le groupe de Minsk - France, Russie, États-Unis - de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), les négociations sur le statut de l’enclave traînent en longueur depuis, ce qui s’explique notamment par l’intransigeance arménienne qui laisse perdurer l’état d’occupation de territoires pourtant internationalement reconnus comme appartenant à l’Azerbaïdjan.
Une offensive éclair
Tester les défenses karabakhthsies? Rappeler au monde ce conflit oublié? Bousculer les équilibres régionaux? Si les buts de l'attaque azérie restent flous, force est de constater que la tentative de guerre éclair a plutôt échoué. Les bombardements ont certes atteint la ville de Martakert - 5.000 habitants - qui avait été épargnée depuis 1994 mais la contre offensive arménienne a réussi à repousser les troupes azéries et un cessez-le-feu, signé sous l'égide de Poutine, a mis fin aux affrontements dès le 5 avril 2016. Comme l'a déclaré le ministre des Affaires étrangères du Haut-Karabakh, Karen Mirzoïan, vantant le fait que "sa nation était soudée", "c'est une chose d'affirmer qu'on peut prendre un pays en deux jours et une autre d'envoyer des appelés à la mort".
Au terme de ces trois jours de conflit, Bakou a quand même pu revendiquer la prise de trois "hauteurs" dans le nord-est et le sud-est du territoire. Bilan des combats: 31 soldats azéris tués, 44 Karabakhtsis et une dizaine de civils.
Au terme de ces trois jours de conflit, Bakou a quand même pu revendiquer la prise de trois "hauteurs" dans le nord-est et le sud-est du territoire. Bilan des combats: 31 soldats azéris tués, 44 Karabakhtsis et une dizaine de civils.
Un Haut-Karabakh sous perfusion arménienne
Devant l'impossibilité d'obtenir formellement un rattachement au grand frère arménien, le Haut-Karabakh a entrepris de construire un semblant d’État avec institutions, drapeaux, représentations diplomatiques à l'étranger et même un aéroport (inutilisé en raison de la menace de bombardements azéris). Néanmoins, la survie serait difficile sans un soutien massif d'Erevan - la capitale arménienne - qui finance la moitié des besoins du Karabakh et la totalité de son budget militaire. Par ailleurs, les citoyens arméniens ont la possibilité d'effectuer leur service dans l'armée karabakhtsie, une armée qui revendique pas moins de 25.000 hommes, sur une population de 150.000. La résurgence du conflit a aussi vu affluer de nombreux volontaires venus d'Arménie, à travers notamment l'Union de volontaires Erkrapa - une association en relation avec le ministère arménien de la Défense - qui aurait, selon son porte parole, enregistré 10.000 inscriptions depuis début avril. La question du Haut-Karabakh est donc partie intégrante de l'identité arménienne au point que le sujet soi dans toutes les conversations et que sur les écrans de télévision arméniens s'affiche régulièrement le slogan "Nous sommes l'Artsakh (nom arménien du Kaut-Karabakh)". Des programmes militaires et patriotiques sont également diffusés dans les principaux médias du pays pour rappeler à quel point Arménie et Haut-Karabakh ne font qu'un. La diaspora arménienne - particulièrement forte en France - n'est pas en reste et les envois d'aide humanitaire vers la région sécessionniste ont largement augmenté ces dernières semaines.
Vers un conflit international?
Une telle solidarité du peuple arménien - toutes les générations et tous les milieux sociaux sont représentés parmi les volontaires - face à l'ennemi historique azéri ne laisse pas augurer de lendemains pacifiques dans la région. Pourtant, au vu des ramifications internationales du conflit, on peut penser que la communauté internationale, et notamment le groupe de Minsk, fera tout pour éviter que l'escalade des tensions ne prenne trop d'ampleur.
La réaction rapide de Moscou démontre en effet que de nombreux pays auraient beaucoup à perdre en cas de véritable embrasement. L'éclatement d'une guerre dans cette région - où se trouve l'une des plus importantes concentrations d'armes au monde - risquerait d'abord d'impliquer le Daghestan voisin (qui comprend une forte minorité azérie) et donc indirectement la Russie. Plus grave encore, la Turquie, grande sœur de l'Azerbaïdjan et ennemie historique de l'Arménie (Ankara refuse toujours de reconnaître le génocide arménien de 1915) ne resterait sûrement pas à l'écart du conflit et Recep Tayip Erdogan a déjà affirmé son soutien aux Azéris.
En outre, l'Arménie étant membre de l'Organisation du traité de sécurité collective (OSTC) dont est membre la Russie et la Turquie faisant partie de l'OTAN, cela pourrait dans le pire des cas déboucher sur un conflit entre les deux organisations; et ce d'autant plus que les tensions Turquie/Russie sont déjà fortes sur le dossier syrien. Pour ne rien arranger, la Géorgie et sa forte minorité azérie pourrait elle aussi être entraînée tout comme l'Iran, très méfiant à l'égard de l'Azerbaïdjan et de sa proximité avec Israël.
Une telle escalade, si elle demeure pour le moment très improbable, n'en est pas moins impossible et appelle à un retour sérieux des négociations sous l'égide du Groupe de Minsk. Car si la guerre totale est difficile à imaginer, la paix totale paraît elle aussi être une perspective utopique.
La réaction rapide de Moscou démontre en effet que de nombreux pays auraient beaucoup à perdre en cas de véritable embrasement. L'éclatement d'une guerre dans cette région - où se trouve l'une des plus importantes concentrations d'armes au monde - risquerait d'abord d'impliquer le Daghestan voisin (qui comprend une forte minorité azérie) et donc indirectement la Russie. Plus grave encore, la Turquie, grande sœur de l'Azerbaïdjan et ennemie historique de l'Arménie (Ankara refuse toujours de reconnaître le génocide arménien de 1915) ne resterait sûrement pas à l'écart du conflit et Recep Tayip Erdogan a déjà affirmé son soutien aux Azéris.
En outre, l'Arménie étant membre de l'Organisation du traité de sécurité collective (OSTC) dont est membre la Russie et la Turquie faisant partie de l'OTAN, cela pourrait dans le pire des cas déboucher sur un conflit entre les deux organisations; et ce d'autant plus que les tensions Turquie/Russie sont déjà fortes sur le dossier syrien. Pour ne rien arranger, la Géorgie et sa forte minorité azérie pourrait elle aussi être entraînée tout comme l'Iran, très méfiant à l'égard de l'Azerbaïdjan et de sa proximité avec Israël.
Une telle escalade, si elle demeure pour le moment très improbable, n'en est pas moins impossible et appelle à un retour sérieux des négociations sous l'égide du Groupe de Minsk. Car si la guerre totale est difficile à imaginer, la paix totale paraît elle aussi être une perspective utopique.