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La directive "secret d’affaires" ou la victoire du capitalisme sur la démocratie


Par Rédigé le 26/04/2016 (dernière modification le 25/04/2016)

En créant un socle juridique européen permettant de consolider la protection des intérêts commerciaux des entreprises, la directive dite "secrets d’affaires", adoptée à une large majorité par le Parlement européen, met en danger le droit des citoyens d’être informés de sujets d’intérêt général.


Une protection renforcée des intérêts commerciaux

secrets_d_affaires.mp3 Secrets d'affaires.mp3  (1.68 Mo)

Jeudi 14 avril 2016, 77% des eurodéputés se sont prononcés en faveur de la directive sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d'affaires) contre l'obtention, l'utilisation et la divulgation illicites. Seuls 20% des parlementaires se sont opposés à l’adoption du texte. 3% se sont abstenus.

Sur sa page Facebook, la comédienne Nicole Ferroni a partagé un tableau récapitulatif du vote des eurodéputés français. On y constate que tout l’échiquier politique, depuis le Front National jusqu’au Parti Socialiste en passant par Les Républicains et le Centre, a voté pour l’adoption du texte. Seuls Europe Écologie Les Verts et le Front de Gauche se sont prononcés contre.

Lutte contre l’espionnage économique et industriel, protection de l’innovation et de la recherche, défense de la compétitivité européenne: tels sont les motifs invoqués par les eurodéputés en faveur de l’adoption de la directive.
Jusqu’alors, le secret d’affaires n’était pas protégé en tant que tel par tous les États membres de l’Union européenne.

Ce patrimoine immatériel auquel est rattaché une certaine valeur commerciale était en effet couvert de façon indirecte par d’autres outils juridiques relevant de la concurrence déloyale, de la propriété intellectuelle, du droit du travail ou encore du droit pénal. Une diversité de sources normatives qui porterait préjudice aux petites et moyennes entreprises, incapables d’actionner ces différents leviers juridiques pour défendre leurs intérêts commerciaux. Il faut cependant souligner que c’est d’un groupe de multinationales qu’avait émané, en 2010, le souhait d’une telle règlementation.


Une fragilisation de la liberté d’expression et du droit à l’information

Dès novembre 2014, une pétition signée par plus de 500.000 citoyens ainsi qu’un appel commun d’une cinquantaine d’ONG, de syndicats, de journalistes, d’avocats et de magistrats avaient été lancés pour lutter contre l’adoption de ce texte.

Alors que l’affaire des "Panama Papers" continue de révéler l’opacité totale à laquelle font face les citoyens quant aux pratiques des entreprises, l’adoption de ce texte à une large majorité apparaît donc comme un nouveau pied-de-nez à la démocratie.

Afin d’apaiser les critiques relatives aux dangers pour la liberté d’expression, un amendement excluant les journalistes du champ d’application de la directive a été adopté par le Parlement européen. Quant aux lanceurs d’alerte, le texte explique qu’ils ne pourront pas faire l’objet de poursuites s’ils violent le secret des affaires dans le but de protéger l’intérêt public, ce qu’il leur reviendra de prouver au cas par cas à la justice. Rajoutons que seules les révélations concernant des fautes, des malversations ou des activités illégales seront susceptibles d’être justifiées par l’intérêt général. Preuve, s’il en fallait, qu’il n’est ici absolument pas question d’éthique.










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