La nostalgie est toujours ce qu'elle était
Année Molière.mp3 (100.2 Ko)
Ce n’est pas sans une certaine émotion, comme un pincement au cœur, que l’on retrouve des amis. Quand la fine fleur de la Maison de Molière s’encanaille pour le Maître, on pleure. Sur notre jeunesse, une certaine époque, une certaine tradition du théâtre, du respect du public, de l’auteur, avec en prime cette joie communicative et cet entrain irrésistibles, cette diction, cette mâle gaieté si triste et si profonde sans laquelle Molière ne serait pas Molière.
Haut, très haut dans cette habile compilation nous mettrons le "Tartuffe" capté en 1973 par Pierre Badel.
Pour le regretté Jacques Charon, Orgon précieux, raffiné, un tantinet aux penchants homosexuels pour son Tartuffe dégoulinant d'hypocrisie calculée de Robert Hirsch. Ce dernier: immense cloporte, petite larve maléfique pleine de saloperie et de fausse bondieuserie.
Plaisir aussi de retrouver les regrettés Claude Winter, Denise Gence, Michel Duchaussoy d'une complicité réjouissante, d'un métier sûr, d'une classe folle.
Dans la même veine, "Le Malade imaginaire" (mise en scène de Jean-Laurent Cocher en 1974) immortalise la très fine composition de Jacques Charron. Un malade bien portant, crevant de santé, berné comme pas deux, d'une faconde à la Raimu simplement irrésistible.
Il est entouré par Georges Descrières en Fleurant histrionique qui s'en donne à cœur joie dans ses imprécations, Françoise Seigner Toinette au bon sens diabolique, Catherine Hiegel, Angélique qui porte bien son nom, Simon Eine, Bérengère Dautun (complices comme pas deux) et... Jacques Toja (Béralde) qui nous joue, comme dans le "Tartuffe", le jeune Louis XIV dans la série des "Angélique Marquise des Anges". Jouissif! Génial!
"L'Avare", sous les caméras de René Lucot en 1974, voit le sacre de Michel Aumont qui venait d'être un formidable Richard III en Avignon deux étés auparavant.
Dieu que la mise en scène de Jean-Paul Roussillon (ici un La Flèche vicieux et retors dans le regard) est noire, triste comme un jour sans pain! Loin de la chorégraphie musicale d'un Jean Vilar au T.N.P., elle cerne dans une analyse profonde, au mieux, les tourments de cet Harpagon, névrosé, voire carrément dangereux psychiatrique.
Les apparitions de Ludmila Mickaël (Élise), Isabelle Adjani (Marianne) et Francis Huster (Cléante) semblent comme des rayons de soleil dans cette demeure asphyxiante, compassée où Simon Eine campe un Valère pétri d'humanité compatissante. Françoise Seigner joue avec délice les entremetteuses avides de reconnaissance. Excellence de la floppée des "petits rôles": Sissia, Arnaud, Pignot...
Quittant un moment ses charges d'administrateur, Pierre Dux, en 1977, reprend, affine, rajeunit, pourlèche, saupoudre de satins et de brocards sa mise en scène du "Misanthrope" qui permet à Georges Descrières de quitter enfin le smoking et les divers maquillages d'Arsène Lupin.
Le ton reste (dans le bon sens du terme) classique, mais sans ennui. Répliques, mouvements, attitudes sont calculés au millimètre près. S'approchant des vers de Célimène avec la sensualité d'une chatte autour d'une jatte de lait, Béatrice Agenin dessine une veuve joyeuse sûre de sa beauté, de sa jeunesse, de son pouvoir. Les caméras satinées de Jean-Paul Carrère cernent les acteurs avec la douceur vicieuse d'une analyse insidieuse de l'âme et des cœurs, d'où aucun ne sort indemne.
Même l'Arsinoé de Bérengère Dautun se prend les pieds dans son propre tapis. Bien croqués, diablement sympathiques les petits marquis Philippe Rondest et Guy Michel sortis tout droit d'une soirée échangiste organisée par Monsieur, Frère du Roy... Michel Duchaussoy enfin apporte à Philinte une bonhomie, une compassion, une vérité pleine de bon sens populaire devant les apparitions satinées de Dominique Constanza, ravissante Éliante.
Jean-Paul Roussillon enfin, décape en 1978 "Les Femmes savantes", de belle manière: irrésistible, savoureuse Denise Gence en Bélise rêveuse, piquante comme une mouche la Martine de Christine Murillo, éperdu et fou d'amour Simon Eine en Clitandre...
La danse macabre et prétentieuse des savantes émeut plus qu'elle ne fait rire. Françoise Seigner, Philaminte ex-précieuse ridicule, sa prétentieuse fille Armande, Catherine Ferran à son meilleur, ne font qu'une bouchée de la pauvre Henriette dessinée avec l'agilité d'un fusain aérien par Dominique Constanza.
Une fois encore l'entourage est de luxe. François Chaumette, Louis Arbessier sont frères d'armes et de métier, ingénieux jusque dans leurs silences bien captés par l'ingénieuse caméra d'André Flérerick. Ils ont quand même tous deux débutés avec Jean Vilar et Gérard Philipe à la Libération...
Inénarrables également les Trissotin et Vadius,dans une caricature à la Daumier avant l'heure, vus par Jean-Luc Boutté et Jacques Sereys.
Bref, une collection qui devrait figurer dans toutes les écoles, les conservatoires, les musées… partout!
Haut, très haut dans cette habile compilation nous mettrons le "Tartuffe" capté en 1973 par Pierre Badel.
Pour le regretté Jacques Charon, Orgon précieux, raffiné, un tantinet aux penchants homosexuels pour son Tartuffe dégoulinant d'hypocrisie calculée de Robert Hirsch. Ce dernier: immense cloporte, petite larve maléfique pleine de saloperie et de fausse bondieuserie.
Plaisir aussi de retrouver les regrettés Claude Winter, Denise Gence, Michel Duchaussoy d'une complicité réjouissante, d'un métier sûr, d'une classe folle.
Dans la même veine, "Le Malade imaginaire" (mise en scène de Jean-Laurent Cocher en 1974) immortalise la très fine composition de Jacques Charron. Un malade bien portant, crevant de santé, berné comme pas deux, d'une faconde à la Raimu simplement irrésistible.
Il est entouré par Georges Descrières en Fleurant histrionique qui s'en donne à cœur joie dans ses imprécations, Françoise Seigner Toinette au bon sens diabolique, Catherine Hiegel, Angélique qui porte bien son nom, Simon Eine, Bérengère Dautun (complices comme pas deux) et... Jacques Toja (Béralde) qui nous joue, comme dans le "Tartuffe", le jeune Louis XIV dans la série des "Angélique Marquise des Anges". Jouissif! Génial!
"L'Avare", sous les caméras de René Lucot en 1974, voit le sacre de Michel Aumont qui venait d'être un formidable Richard III en Avignon deux étés auparavant.
Dieu que la mise en scène de Jean-Paul Roussillon (ici un La Flèche vicieux et retors dans le regard) est noire, triste comme un jour sans pain! Loin de la chorégraphie musicale d'un Jean Vilar au T.N.P., elle cerne dans une analyse profonde, au mieux, les tourments de cet Harpagon, névrosé, voire carrément dangereux psychiatrique.
Les apparitions de Ludmila Mickaël (Élise), Isabelle Adjani (Marianne) et Francis Huster (Cléante) semblent comme des rayons de soleil dans cette demeure asphyxiante, compassée où Simon Eine campe un Valère pétri d'humanité compatissante. Françoise Seigner joue avec délice les entremetteuses avides de reconnaissance. Excellence de la floppée des "petits rôles": Sissia, Arnaud, Pignot...
Quittant un moment ses charges d'administrateur, Pierre Dux, en 1977, reprend, affine, rajeunit, pourlèche, saupoudre de satins et de brocards sa mise en scène du "Misanthrope" qui permet à Georges Descrières de quitter enfin le smoking et les divers maquillages d'Arsène Lupin.
Le ton reste (dans le bon sens du terme) classique, mais sans ennui. Répliques, mouvements, attitudes sont calculés au millimètre près. S'approchant des vers de Célimène avec la sensualité d'une chatte autour d'une jatte de lait, Béatrice Agenin dessine une veuve joyeuse sûre de sa beauté, de sa jeunesse, de son pouvoir. Les caméras satinées de Jean-Paul Carrère cernent les acteurs avec la douceur vicieuse d'une analyse insidieuse de l'âme et des cœurs, d'où aucun ne sort indemne.
Même l'Arsinoé de Bérengère Dautun se prend les pieds dans son propre tapis. Bien croqués, diablement sympathiques les petits marquis Philippe Rondest et Guy Michel sortis tout droit d'une soirée échangiste organisée par Monsieur, Frère du Roy... Michel Duchaussoy enfin apporte à Philinte une bonhomie, une compassion, une vérité pleine de bon sens populaire devant les apparitions satinées de Dominique Constanza, ravissante Éliante.
Jean-Paul Roussillon enfin, décape en 1978 "Les Femmes savantes", de belle manière: irrésistible, savoureuse Denise Gence en Bélise rêveuse, piquante comme une mouche la Martine de Christine Murillo, éperdu et fou d'amour Simon Eine en Clitandre...
La danse macabre et prétentieuse des savantes émeut plus qu'elle ne fait rire. Françoise Seigner, Philaminte ex-précieuse ridicule, sa prétentieuse fille Armande, Catherine Ferran à son meilleur, ne font qu'une bouchée de la pauvre Henriette dessinée avec l'agilité d'un fusain aérien par Dominique Constanza.
Une fois encore l'entourage est de luxe. François Chaumette, Louis Arbessier sont frères d'armes et de métier, ingénieux jusque dans leurs silences bien captés par l'ingénieuse caméra d'André Flérerick. Ils ont quand même tous deux débutés avec Jean Vilar et Gérard Philipe à la Libération...
Inénarrables également les Trissotin et Vadius,dans une caricature à la Daumier avant l'heure, vus par Jean-Luc Boutté et Jacques Sereys.
Bref, une collection qui devrait figurer dans toutes les écoles, les conservatoires, les musées… partout!