Vive le biopic...m4a (2.47 Mo)
Le 16 janvier 2019, sortait en France "Colette", sous-titré "Portrait d'une jeune femme moderne", film de l’Américain Wash Westmoreland. Le 7 janvier, il était présenté en avant-première dans la salle de l'Orangerie à Saint-Sauveur-en-Puisaye, localité bourguignonne d’où est originaire Colette, née Sidonie-Gabrielle Colette. Auparavant, il avait été salué par la critique lors de sa première mondiale au Festival du film de Sundance de janvier 2018. C’est le premier film que Wash Westmoreland réalise seul. Grand admirateur de la vie et de l'œuvre de Colette, il en portait le projet depuis 2001, mais quelques événements en avaient retardé le tournage, en grande partie à Budapest où les quartiers Art nouveau sont mieux conservés. Il en a d’ailleurs écrit le scénario avec son compagnon Richard Glatzer maintenant disparu.
Le réalisateur s’est intéressé à la fin de l’adolescence insouciante de l’écrivain, interprétée par Keira Knightley, à Chatillon-sur-Loing où sa famille a déménagé jusque son émancipation et son véritable début dans les lettres sous son nom propre. A vingt ans, en mai 1894, elle épouse Henry Gauthier-Villars, son aîné de 14 ans, plus connu sous le nom de Willy, campé par Dominic West. Fils d’éditeur, écrivain et critique, il gagne sa vie en signant des livres que lui écrivent ceux qu’on appelait alors des nègres… Colette le suit à Paris et il l’introduit dans le monde artistique et littéraire de l’époque, très bien reconstitué. C’est un viveur, séducteur, manipulateur, joueur et souvent couvert de dettes. La découverte du talent littéraire de sa femme arrange bien ses affaires et il la met au travail, n’hésitant pas à l’enfermer à clé… Elle écrira la série des "Claudine" qu’il signera, les œuvres connaissent un grand succès et sont adaptées au théâtre. Avec la complicité de Willy, elle donne libre cours à son goût pour les femmes, après plusieurs expérience, elle rencontre en 1905 Missy. Surnom de Mathilde, fille du duc de Morny, demi-frère de Napoléon III et de la princesse Sophie Troubetzkoï. Cette l’arrière-petite-fille de Talleyrand et aussi de l'impératrice Joséphine, récemment divorcée du marquis de Belbeuf, disposait d'une immense fortune. Habillée en homme, elle avait une réputation sulfureuse. Le film restitue leur spectacle "Rêve d'Egypte" donné le 3 janvier 1907 au Moulin Rouge, Colette interprète une momie ranimée par le baiser fougueux que lui donne un archéologue qui n’est autre que Missy… S’ensuivit un chahut indescriptible et le préfet Lépine fit interdire le spectacle. Colette qui a suivi l’enseignement du mime Georges Wague entreprend alors une carrière au music-hall qui durera jusqu’en 1912. Ce qui lui inspirera "La Vagabonde en 1910" et "L’envers du music hall" en 1913. Elle se séparera de Willy en 1906, il avait vendu les droits de plusieurs titres des "Claudine" à leur éditeur, Ollendorff, ce qui n’arrange pas une relation déjà fort dégradée. Le divorce sera prononcé en 1910. En 1936, cinq ans après la mort de Willy, Colette réglera ses comptes avec lui dans "Mes apprentissages".
Le film d'une durée de 1h51 est très élégant, le défilé des personnalités plus ou moins célèbres de l’époque est impressionnant bien qu’il lui ait été reproché d’être assez conventionnel. Cette reconstitution est assez fascinante mais ne suscite pas un enthousiasme délirant. Certes, nous n’irons pas jusqu’à lancer comme Véronique Cauhapé dans le Monde "Rien ne pétille dans ce Colette académique où triste à mourir" ou comme tel autre critique qui assène "Académique, sans âme, lisse"… Le fait que le film soit en anglais n’arrange pas les choses, cela semble étrange d’entendre cette langue lorsque des passages des œuvres de Colette sont évoqués. Sans parler du fort accent bourguignon dont l’écrivain ne s’était jamais départi et dont on est privé naturellement… Néanmoins, le portrait de Willy correspond assez bien à celui que l’on peut imaginer de l’homme de ces années-là et son opportunisme sans scrupules est bien restitué.
En revanche, lorsque le réalisateur nous dit "J’ai l'impression qu'il y a dans ce film une inspiration très proche du mouvement #metoo. Il s'agit en effet d'une femme qui surmonte les obstacles d'une société répressive et qui affirme sa singularité. Le parallèle est évident", on a bien quelque mal à être d’accord. La revendication de Colette nous semble bien timide et quitter un mari pour une femme, fût-elle marquise, ne semble pas pour cette époque et surtout dans cette catégorie sociale, un acte de rébellion bien convaincant…
On peut espérer que cette fresque donnera envie de (re)lire les œuvres d’un des plus grands écrivains du XXe siècle.
Le réalisateur s’est intéressé à la fin de l’adolescence insouciante de l’écrivain, interprétée par Keira Knightley, à Chatillon-sur-Loing où sa famille a déménagé jusque son émancipation et son véritable début dans les lettres sous son nom propre. A vingt ans, en mai 1894, elle épouse Henry Gauthier-Villars, son aîné de 14 ans, plus connu sous le nom de Willy, campé par Dominic West. Fils d’éditeur, écrivain et critique, il gagne sa vie en signant des livres que lui écrivent ceux qu’on appelait alors des nègres… Colette le suit à Paris et il l’introduit dans le monde artistique et littéraire de l’époque, très bien reconstitué. C’est un viveur, séducteur, manipulateur, joueur et souvent couvert de dettes. La découverte du talent littéraire de sa femme arrange bien ses affaires et il la met au travail, n’hésitant pas à l’enfermer à clé… Elle écrira la série des "Claudine" qu’il signera, les œuvres connaissent un grand succès et sont adaptées au théâtre. Avec la complicité de Willy, elle donne libre cours à son goût pour les femmes, après plusieurs expérience, elle rencontre en 1905 Missy. Surnom de Mathilde, fille du duc de Morny, demi-frère de Napoléon III et de la princesse Sophie Troubetzkoï. Cette l’arrière-petite-fille de Talleyrand et aussi de l'impératrice Joséphine, récemment divorcée du marquis de Belbeuf, disposait d'une immense fortune. Habillée en homme, elle avait une réputation sulfureuse. Le film restitue leur spectacle "Rêve d'Egypte" donné le 3 janvier 1907 au Moulin Rouge, Colette interprète une momie ranimée par le baiser fougueux que lui donne un archéologue qui n’est autre que Missy… S’ensuivit un chahut indescriptible et le préfet Lépine fit interdire le spectacle. Colette qui a suivi l’enseignement du mime Georges Wague entreprend alors une carrière au music-hall qui durera jusqu’en 1912. Ce qui lui inspirera "La Vagabonde en 1910" et "L’envers du music hall" en 1913. Elle se séparera de Willy en 1906, il avait vendu les droits de plusieurs titres des "Claudine" à leur éditeur, Ollendorff, ce qui n’arrange pas une relation déjà fort dégradée. Le divorce sera prononcé en 1910. En 1936, cinq ans après la mort de Willy, Colette réglera ses comptes avec lui dans "Mes apprentissages".
Le film d'une durée de 1h51 est très élégant, le défilé des personnalités plus ou moins célèbres de l’époque est impressionnant bien qu’il lui ait été reproché d’être assez conventionnel. Cette reconstitution est assez fascinante mais ne suscite pas un enthousiasme délirant. Certes, nous n’irons pas jusqu’à lancer comme Véronique Cauhapé dans le Monde "Rien ne pétille dans ce Colette académique où triste à mourir" ou comme tel autre critique qui assène "Académique, sans âme, lisse"… Le fait que le film soit en anglais n’arrange pas les choses, cela semble étrange d’entendre cette langue lorsque des passages des œuvres de Colette sont évoqués. Sans parler du fort accent bourguignon dont l’écrivain ne s’était jamais départi et dont on est privé naturellement… Néanmoins, le portrait de Willy correspond assez bien à celui que l’on peut imaginer de l’homme de ces années-là et son opportunisme sans scrupules est bien restitué.
En revanche, lorsque le réalisateur nous dit "J’ai l'impression qu'il y a dans ce film une inspiration très proche du mouvement #metoo. Il s'agit en effet d'une femme qui surmonte les obstacles d'une société répressive et qui affirme sa singularité. Le parallèle est évident", on a bien quelque mal à être d’accord. La revendication de Colette nous semble bien timide et quitter un mari pour une femme, fût-elle marquise, ne semble pas pour cette époque et surtout dans cette catégorie sociale, un acte de rébellion bien convaincant…
On peut espérer que cette fresque donnera envie de (re)lire les œuvres d’un des plus grands écrivains du XXe siècle.