ELIE / CYPRIEN / JACK PRICE, QUI EST QUI ?
«Pendant le tournage, on a fait beaucoup d’allers-retours entre les scènes de Cyprien et les scènes de Jack Price. Je préférais retrouver mes habits de Cyprien, parce qu’il est beaucoup plus proche de moi. J’ai moins d’empathie pour Jack Price. Pour le créer, j’ai pensé à l’exact contraire de Cyprien, dans sa démarche, son port de tête, sa voix.
Cyprien et moi, on refuse la réalité. Il a le même manque affectif sans lequel je n’aurais jamais fait ce métier. J’ai peut-être plus besoin d’être aimé que d’autres : J’ai beau remplir des salles de 4000 personnes, ça ne comble pas ce manque. Le succès n’a rien à voir avec le bonheur ! On est contents d’être aimés par le public, mais ça reste virtuel...»
Elie Semoun
«Cyprien est en phase avec Elie tel qu’il est dans la vie. Il peut être hilarant, mais les failles et l’émotion ne sont jamais loin. Contrairement à ce que les gens pensent parfois, il n’est pas du tout dans la recherche permanente de gags. Il se dégage de lui quelque chose d’émouvant. Dès que nous avons commencé à travailler, nous avons tous deux souhaité que Cyprien, contrairement au personnage un peu pervers qu’il est dans «Les petites annonces», soit touchant et gagne l’empathie du spectateur. Cyprien cherche l’amour de manière complètement utopique, comme un enfant. Il s’imagine que le plus beau mannequin du monde peut l’aimer. Il a un côté naïf, lunaire. Bien que constamment humilié, il reste gentil et ne voit pas le mal qui l’entoure. Jack Price, son alter ego, va lui permettre de prendre sa revanche, en amenant une composante de méchanceté qui n’existe pas en Cyprien. Pour des raisons techniques, nous avons dû tourner par décor et Elie devait régulièrement alterner Jack et Cyprien. Il s’en est admirablement sorti. Nous étions tous bluffés.»
David Charhon
«Quand il joue Cyprien, il est Cyprien. Quand il joue Jack Price, il est Jack Price, ce qui lui a cependant donné un peu de mal car il l’appréciait moins. La scène de la chorégraphie sur la patinoire m’a enchantée.»
Léa Drucker
Cyprien et moi, on refuse la réalité. Il a le même manque affectif sans lequel je n’aurais jamais fait ce métier. J’ai peut-être plus besoin d’être aimé que d’autres : J’ai beau remplir des salles de 4000 personnes, ça ne comble pas ce manque. Le succès n’a rien à voir avec le bonheur ! On est contents d’être aimés par le public, mais ça reste virtuel...»
Elie Semoun
«Cyprien est en phase avec Elie tel qu’il est dans la vie. Il peut être hilarant, mais les failles et l’émotion ne sont jamais loin. Contrairement à ce que les gens pensent parfois, il n’est pas du tout dans la recherche permanente de gags. Il se dégage de lui quelque chose d’émouvant. Dès que nous avons commencé à travailler, nous avons tous deux souhaité que Cyprien, contrairement au personnage un peu pervers qu’il est dans «Les petites annonces», soit touchant et gagne l’empathie du spectateur. Cyprien cherche l’amour de manière complètement utopique, comme un enfant. Il s’imagine que le plus beau mannequin du monde peut l’aimer. Il a un côté naïf, lunaire. Bien que constamment humilié, il reste gentil et ne voit pas le mal qui l’entoure. Jack Price, son alter ego, va lui permettre de prendre sa revanche, en amenant une composante de méchanceté qui n’existe pas en Cyprien. Pour des raisons techniques, nous avons dû tourner par décor et Elie devait régulièrement alterner Jack et Cyprien. Il s’en est admirablement sorti. Nous étions tous bluffés.»
David Charhon
«Quand il joue Cyprien, il est Cyprien. Quand il joue Jack Price, il est Jack Price, ce qui lui a cependant donné un peu de mal car il l’appréciait moins. La scène de la chorégraphie sur la patinoire m’a enchantée.»
Léa Drucker
Rencontre avec Jack Price D.A. de Dress Code Magazine, tombeur de ces dames
Vous avez un regard acéré, sans concession, mais qui ne méprise pas. Comment structurez-vous vos personnages ?
La base de mes spectacles, c’est la solitude, la misère humaine. Ça touche le public par le rire, mais aussi de manière plus personnelle. Mes personnages ont beau être des monstres, on s’y attache. Je ne les méprise pas du tout, au contraire, ils sont tous un peu moi, mes faiblesses, ma solitude. À la base, je n’étais pas un grand fan du Bigleux, je le trouvais un peu limité.Il ne pouvait pas exister seulement par son fantasme d’attraper une jolie blonde à forte poitrine. Il a fallu creuser pour qu’il devienne «réel».
Vous êtes entourés de beaucoup de talents...
La production et moi, avons choisit David Charhon, le réalisateur, après avoir vu un de ses supers courts-métrages. C’est un excellent metteur en scène et on a très bien fonctionné ensemble. Quand on fait une comédie avec un comique, pour éviter de faire trop léger, que ça sonne «faux», il faut des acteurs qui ont du poids pour donner un peu de réalité à l’histoire. C’est comme ça que David et Pierre Jacques
Rencontre avec Jack Price
D.A. de Dress Code Magazine, tombeur de ces dames Benichou, le Directeur de Casting, ont pensé toute la distribution. J’ai été ravi de jouer avec Léa Drucker ! Avec son côté concret, réel, elle permet d’entrer plus facilement dans cet univers décalé. Elle a le regard du public sur le magazine et le monde poétique que forment Cyprien et sa bande. J’avais déjà joué avec Laurent Stocker dans AUX ABOIS de Philippe Collin. J’ai tout de suite pensé à lui.
Lors des essais, Vincent Desagnat sortait vraiment du lot. Il s’est très vite mis à l’aise et il est vraiment très bien. J’étais fou de joie quand Catherine Deneuve a accepté. Je n’aurais jamais cru qu’on puisse l’avoir. Elle est étonnante dans le rôle de la mère autoritaire. Elle en impose en restant humaine. Travailler avec elle, c’était incroyable.
Lorsqu’elle se tientdevant une photo où figure également Yves Saint-Laurent, on assiste à une espèce de mise en abyme de sa propre histoire et de son propre rapport à la mode...
David a toujours eu envie d’utiliser cette photo dans le film. Yves Saint-Laurent est décédé un peu plus tard. Lorsque Catherine Deneuve est entrée dans le décor et s’est attardée devant ce tableau, on était tous très émus.
Le «thrill» du plateau de cinéma, les projecteurs, c’était comment ?
Fatiguant ! Le tournage a duré quarante-sept jours, et j’ai tourné tous les jours ! Et puis j’écrivais un spectacle et je passais par une période un peu difficile de ma vie privée, autant sentimentale que professionnelle. Je me sentais un peu seul, mais je pense que ça a pas mal aidé pour construire Cyprien. Le cinéma fixe les choses une fois pour toutes sur la pellicule. Quand on réussit son coup, qu’on a trouvé un bon gag, une bonne situation, c’est génial ! Plus besoin de recommencer chaque soir. On peut revoir des Chaplin ou des De Funès des dizaines d’années plus tard avec la même énergie. Mais c’est moins de plaisir que de jouer avec un public en face de soi. C’est plus agréable de donner la réplique que de jouer seul, surtout si les partenaires ont le même sens du rythme.
Vous reste-t-il un moment particulier ?
Pendant le tournage, entre les prises, les mises en place, le plaisir est toujours coupé. Alors on pense au résultat, au moment où le public découvrira le film en salle. C’est pour lui que nous avons travaillé...
La base de mes spectacles, c’est la solitude, la misère humaine. Ça touche le public par le rire, mais aussi de manière plus personnelle. Mes personnages ont beau être des monstres, on s’y attache. Je ne les méprise pas du tout, au contraire, ils sont tous un peu moi, mes faiblesses, ma solitude. À la base, je n’étais pas un grand fan du Bigleux, je le trouvais un peu limité.Il ne pouvait pas exister seulement par son fantasme d’attraper une jolie blonde à forte poitrine. Il a fallu creuser pour qu’il devienne «réel».
Vous êtes entourés de beaucoup de talents...
La production et moi, avons choisit David Charhon, le réalisateur, après avoir vu un de ses supers courts-métrages. C’est un excellent metteur en scène et on a très bien fonctionné ensemble. Quand on fait une comédie avec un comique, pour éviter de faire trop léger, que ça sonne «faux», il faut des acteurs qui ont du poids pour donner un peu de réalité à l’histoire. C’est comme ça que David et Pierre Jacques
Rencontre avec Jack Price
D.A. de Dress Code Magazine, tombeur de ces dames Benichou, le Directeur de Casting, ont pensé toute la distribution. J’ai été ravi de jouer avec Léa Drucker ! Avec son côté concret, réel, elle permet d’entrer plus facilement dans cet univers décalé. Elle a le regard du public sur le magazine et le monde poétique que forment Cyprien et sa bande. J’avais déjà joué avec Laurent Stocker dans AUX ABOIS de Philippe Collin. J’ai tout de suite pensé à lui.
Lors des essais, Vincent Desagnat sortait vraiment du lot. Il s’est très vite mis à l’aise et il est vraiment très bien. J’étais fou de joie quand Catherine Deneuve a accepté. Je n’aurais jamais cru qu’on puisse l’avoir. Elle est étonnante dans le rôle de la mère autoritaire. Elle en impose en restant humaine. Travailler avec elle, c’était incroyable.
Lorsqu’elle se tientdevant une photo où figure également Yves Saint-Laurent, on assiste à une espèce de mise en abyme de sa propre histoire et de son propre rapport à la mode...
David a toujours eu envie d’utiliser cette photo dans le film. Yves Saint-Laurent est décédé un peu plus tard. Lorsque Catherine Deneuve est entrée dans le décor et s’est attardée devant ce tableau, on était tous très émus.
Le «thrill» du plateau de cinéma, les projecteurs, c’était comment ?
Fatiguant ! Le tournage a duré quarante-sept jours, et j’ai tourné tous les jours ! Et puis j’écrivais un spectacle et je passais par une période un peu difficile de ma vie privée, autant sentimentale que professionnelle. Je me sentais un peu seul, mais je pense que ça a pas mal aidé pour construire Cyprien. Le cinéma fixe les choses une fois pour toutes sur la pellicule. Quand on réussit son coup, qu’on a trouvé un bon gag, une bonne situation, c’est génial ! Plus besoin de recommencer chaque soir. On peut revoir des Chaplin ou des De Funès des dizaines d’années plus tard avec la même énergie. Mais c’est moins de plaisir que de jouer avec un public en face de soi. C’est plus agréable de donner la réplique que de jouer seul, surtout si les partenaires ont le même sens du rythme.
Vous reste-t-il un moment particulier ?
Pendant le tournage, entre les prises, les mises en place, le plaisir est toujours coupé. Alors on pense au résultat, au moment où le public découvrira le film en salle. C’est pour lui que nous avons travaillé...
ELIE SEMOUN: Cyprien & Jack Price
Nom : Cyprien
Profession : Responsable informatique de Dress Code Magazine
Caractéristique : Leader One du Team jeux en réseau Godzilla, tombeur de ces clés usb
Comment le personnage du Bigleux est-il né ?
J’ai eu l’idée du Bigleux il y a des années : un type qui passait dans la rue en bas de chez moi avec de grosses lunettes et un énorme casque de walkman sur la tête qui chantait comme s’il était seul au monde. En le voyant, je me suis demandé comment un mec comme ça pouvait arriver à se taper une «jolie blonde à forte poitrine». Tout est parti du décalage entre son apparence et ce que je pensais être ses rêves, comme pour tous mes personnages, d’ailleurs.
Comment le projet du film est-il né ?
J’adore les films à sketchs des années 60-70. C’est ce que j’avais proposé à Arthur : j’avais réuni plein de petites scènes tirées de mes spectacles - Micheline, Georges-Andrée Gaillard, son fils et son père. En fait, au début, le Bigleux ne faisait pas partie de ma sélection. Je l’avais trop joué, et je ne voyais pas comment le faire vivre sur grand écran. Arthur sent bien les choses, et il pensait que Le Bigleux avait de quoi se développer et a eu l’idée d’en faire un DOCTEUR JEKYLL ET MISTER LOVE revisité...
C’est quoi le Top 10 de vos personnages ?
Quand je fais mes spectacles, j’ai l’impression d’être face à un club de fans qui connaissent mes personnages par coeur. Si je fais un petit déhanché, ils savent que c’est Toufik, si je prends une voie aiguë, ils savent que c’est Kévina, et les gens sont comme des fous. Cyprien faisait partie des tops.
Comme les Jedis avec leurs Padawan, avec CYPRIEN, vous avez créé une mythologie, une gestuelle, un comportement...
Cyprien, c’est un ado-adulte à part. On ne sait pas vraiment l’âge qu’il a, ni s’il a une sexualité. Il ressemble à ces ados pas très à l’aise dans leur peau qui marchent les bras le long du corps. Ça m’a inspiré.
Au cinéma, Cyprien existe dans une autre dimension, avec une autre histoire. Comment êtes-vous arrivé à dépasser les limites du personnage tel qu’il existait ?
J’ai créé une centaine de personnages pour les petites annonces, mais je prends de la distance avec eux. Je peux en parler comme d’un ami ou de quelqu’un que j’ai croisé dans la rue. C’est tellement vrai que la première fois que j’ai vu le film fini, je n’avais pas l’impression de me voir à l’écran. À force de côtoyer Cyprien, j’ai appris à l’aimer. Maintenant, je le trouve génial avec son côté FORREST GUMP très attachant, très émouvant.
Comment est-ce que l’histoire s’est construite ?
Je maîtrise les dialogues et les situations comiques sur des histoires courtes, mais pour des choses plus longues et structurées, j’ai un peu de mal. C’est pourquoi j’ai co-écrit cette histoire avec les scénaristes Benjamin Guedj et Romain Levy. On a créé l’univers de Cyprien, qui auparavant n’existait que devant un rideau rouge de photomaton, en le rendant accro à internet pour en faire le premier personnage «nerd» français. Pour lui qui n’a ni vie sociale, ni vie sentimentale, c’est assez cohérent. Tous mes personnages sont comme ça : ils sont face à un monde dans lequel ils n’arrivent pas à trouver leur place. Cyprien est un vrai gentil, toujours positif, même quand il se fait jeter, c’est pour ça qu’on l’aime bien. Ça fait ressortir le côté dur et cruel du monde qui nous entoure, et c’est encore plus visible dans l’univers de ce magazine de mode.
Être drôle, c’est bien, mais Cyprien et ses potes sont un peu plus que ça...
L’humour n’est pas une fin en soi. Je n’aime pas la blague pour la blague, sans rien derrière. En faisant rire, je veux aussi parler de choses qui touchent et qui émeuvent. Parce que je pense que beaucoup de gens peuvent se reconnaître dans ce qui arrive à Cyprien.
L’univers de Cyprien, c’est quoi ?
Benjamin Guedj et Romain Levy ont une grosse culture de cinéma américain, moi pas. Ils ont beaucoup apporté au film avec ça. Mais je connais mon époque, je sens très bien la tendance actuelle à se refermer sur soi, à cause ou grâce à internet, même si c’est censé nous ouvrir sur le monde. On a de plus en plus de moyens de communiquer et pourtant, les gens n’ont jamais été aussi seuls.
Clark Kent et Superman, Bruce Banner et Hulk, Cyprien et Jack Price, comment gérer une double personnalité ?
Avec Cyprien, ça allait, mais j’avais peur que l’on ne croie pas à Jack Price, son alter ego «beau gosse» un peu con. Dans la scène où je passe de Cyprien à Jack Price en me regardant dans une glace, j’angoissais à l’idée que les gens n’y croient pas. Le public se fera son idée, mais en tout cas, les rôles de composition où l’on passe d’une personnalité à l’autre, c’est mon grand kif !
Au final, il est comment Cyprien ?
Il est émouvant, sympathique, attachant, au final, on a envie d’être copain avec lui. Nous avons toujours eu ça en tête, dès l’écriture.
Votre scène préférée ?
J’adore la scène où je mime un dîner au restaurant alors que je suis seul sur mon vieux canapé. Elle développe la connaissance de Cyprien et de son intimité, c’est pour ça que je l’ai proposée à David. Peut-être que c’est parce que j’ai l’habitude de jouer seul. J’ai besoin de faire partager l’émotion au public. La solitude, la misère sentimentale, c’est une obsession pour moi. C’est pour ça que j’aime autant les comédies italiennes où les personnages sont à la fois pathétiques, bouleversants et drôles.
Profession : Responsable informatique de Dress Code Magazine
Caractéristique : Leader One du Team jeux en réseau Godzilla, tombeur de ces clés usb
Comment le personnage du Bigleux est-il né ?
J’ai eu l’idée du Bigleux il y a des années : un type qui passait dans la rue en bas de chez moi avec de grosses lunettes et un énorme casque de walkman sur la tête qui chantait comme s’il était seul au monde. En le voyant, je me suis demandé comment un mec comme ça pouvait arriver à se taper une «jolie blonde à forte poitrine». Tout est parti du décalage entre son apparence et ce que je pensais être ses rêves, comme pour tous mes personnages, d’ailleurs.
Comment le projet du film est-il né ?
J’adore les films à sketchs des années 60-70. C’est ce que j’avais proposé à Arthur : j’avais réuni plein de petites scènes tirées de mes spectacles - Micheline, Georges-Andrée Gaillard, son fils et son père. En fait, au début, le Bigleux ne faisait pas partie de ma sélection. Je l’avais trop joué, et je ne voyais pas comment le faire vivre sur grand écran. Arthur sent bien les choses, et il pensait que Le Bigleux avait de quoi se développer et a eu l’idée d’en faire un DOCTEUR JEKYLL ET MISTER LOVE revisité...
C’est quoi le Top 10 de vos personnages ?
Quand je fais mes spectacles, j’ai l’impression d’être face à un club de fans qui connaissent mes personnages par coeur. Si je fais un petit déhanché, ils savent que c’est Toufik, si je prends une voie aiguë, ils savent que c’est Kévina, et les gens sont comme des fous. Cyprien faisait partie des tops.
Comme les Jedis avec leurs Padawan, avec CYPRIEN, vous avez créé une mythologie, une gestuelle, un comportement...
Cyprien, c’est un ado-adulte à part. On ne sait pas vraiment l’âge qu’il a, ni s’il a une sexualité. Il ressemble à ces ados pas très à l’aise dans leur peau qui marchent les bras le long du corps. Ça m’a inspiré.
Au cinéma, Cyprien existe dans une autre dimension, avec une autre histoire. Comment êtes-vous arrivé à dépasser les limites du personnage tel qu’il existait ?
J’ai créé une centaine de personnages pour les petites annonces, mais je prends de la distance avec eux. Je peux en parler comme d’un ami ou de quelqu’un que j’ai croisé dans la rue. C’est tellement vrai que la première fois que j’ai vu le film fini, je n’avais pas l’impression de me voir à l’écran. À force de côtoyer Cyprien, j’ai appris à l’aimer. Maintenant, je le trouve génial avec son côté FORREST GUMP très attachant, très émouvant.
Comment est-ce que l’histoire s’est construite ?
Je maîtrise les dialogues et les situations comiques sur des histoires courtes, mais pour des choses plus longues et structurées, j’ai un peu de mal. C’est pourquoi j’ai co-écrit cette histoire avec les scénaristes Benjamin Guedj et Romain Levy. On a créé l’univers de Cyprien, qui auparavant n’existait que devant un rideau rouge de photomaton, en le rendant accro à internet pour en faire le premier personnage «nerd» français. Pour lui qui n’a ni vie sociale, ni vie sentimentale, c’est assez cohérent. Tous mes personnages sont comme ça : ils sont face à un monde dans lequel ils n’arrivent pas à trouver leur place. Cyprien est un vrai gentil, toujours positif, même quand il se fait jeter, c’est pour ça qu’on l’aime bien. Ça fait ressortir le côté dur et cruel du monde qui nous entoure, et c’est encore plus visible dans l’univers de ce magazine de mode.
Être drôle, c’est bien, mais Cyprien et ses potes sont un peu plus que ça...
L’humour n’est pas une fin en soi. Je n’aime pas la blague pour la blague, sans rien derrière. En faisant rire, je veux aussi parler de choses qui touchent et qui émeuvent. Parce que je pense que beaucoup de gens peuvent se reconnaître dans ce qui arrive à Cyprien.
L’univers de Cyprien, c’est quoi ?
Benjamin Guedj et Romain Levy ont une grosse culture de cinéma américain, moi pas. Ils ont beaucoup apporté au film avec ça. Mais je connais mon époque, je sens très bien la tendance actuelle à se refermer sur soi, à cause ou grâce à internet, même si c’est censé nous ouvrir sur le monde. On a de plus en plus de moyens de communiquer et pourtant, les gens n’ont jamais été aussi seuls.
Clark Kent et Superman, Bruce Banner et Hulk, Cyprien et Jack Price, comment gérer une double personnalité ?
Avec Cyprien, ça allait, mais j’avais peur que l’on ne croie pas à Jack Price, son alter ego «beau gosse» un peu con. Dans la scène où je passe de Cyprien à Jack Price en me regardant dans une glace, j’angoissais à l’idée que les gens n’y croient pas. Le public se fera son idée, mais en tout cas, les rôles de composition où l’on passe d’une personnalité à l’autre, c’est mon grand kif !
Au final, il est comment Cyprien ?
Il est émouvant, sympathique, attachant, au final, on a envie d’être copain avec lui. Nous avons toujours eu ça en tête, dès l’écriture.
Votre scène préférée ?
J’adore la scène où je mime un dîner au restaurant alors que je suis seul sur mon vieux canapé. Elle développe la connaissance de Cyprien et de son intimité, c’est pour ça que je l’ai proposée à David. Peut-être que c’est parce que j’ai l’habitude de jouer seul. J’ai besoin de faire partager l’émotion au public. La solitude, la misère sentimentale, c’est une obsession pour moi. C’est pour ça que j’aime autant les comédies italiennes où les personnages sont à la fois pathétiques, bouleversants et drôles.
David Charon: Réalisateur
Pourquoi le cinéma ?
C’est quelque chose qui me tente depuis toujours et dès que j’ai pu, j’ai commencé par des courts métrages. À l’époque où tous mes copains s’intéressaient aux comédiens, j’étais déjà attiré par la mise en scène et j’adorais des réalisateurs comme Brian De Palma, Martin Scorcese, et les chefs opérateurs ! Le côté «derrière la caméra» m’a toujours passionné. J’ai réalisé quatre courts métrages. Dès le deuxième, je me suis dirigé vers la publicité et, pendant une dizaine d’années, j’ai réalisé près de 80 films publicitaires. Sur les plateaux, j’ai pu apprendre mon métier, les exigences qu’un réalisateur doit avoir et les batailles à mener pour défendre ses idées. La publicité est confortable mais elle ne me faisait pas oublier l’essentiel : le cinéma. Je suis donc revenu vers les courts métrages. Mon dernier court métrage, LE SECRET DE SALOMON, avec Lionel Abelanski, a été récompensé un peu partout et m’a ouvert des portes. C’est mon agent, Jean-François Gabard, qui m’a parlé de CYPRIEN. D’habitude, je travaille sur des projets que j’écris, mais là, l’histoire et les thèmes ont immédiatement trouvé un écho en moi. Il y avait aussi bien sûr l’envie de travailler avec Elie. J’ai rencontré les producteurs, Maxime Japy et Arthur, qui ont découvert mon travail, et nous sommes partis ensemble dans cette aventure.
Qu’est ce qui vous touche le plus dans l’histoire de Cyprien ?
Bien que je sois moi-même très entouré, le thème qui me touche d’abord est celui de la solitude. J’ai de l’affection pour ces personnages que l’on ne voit pas, auxquels on ne prête aucune attention. Même s’il a des copains, Cyprien vit dans sa bulle et ne trouve pas sa place dans le monde. Au-delà des thèmes, la personnalité d’Elie en elle-même me touche. Notre volonté d’émotion pouvait paraître paradoxale pour une comédie mais elle en était l’un des axes essentiels.
C’est quoi la «touche» David Charhon sur ce film ?
C’est un projet à plusieurs niveaux de lecture. Il valorise le talent d’Elie, il associe la comédie à quelque chose de plus humain et dès le départ, je souhaitais que l’univers visuel soit original et clairement défini. Comme tout réalisateur, à partir de l’excellent travail des scénaristes, il a fallu que je m’approprie le projet. J’ai donc commencé par l’adaptation des dialogues. J’ai appuyé le côté comédie romantique.
Cyprien est bien entouré... Comment s’est fait le choix ?
La gageure était de réunir un vrai casting de cinéma en oubliant que l’on part d’un personnage de one-man-show. Je souhaitais entourer Elie d’une distribution complètement décalée.
Léa Drucker a été notre premier choix. Elle apporte une véritable crédibilité au film, déclenchant des sentiments auxquels chacun peut se rattacher. Elle incarne la valeur étalon, la normalité de ce film. Elle joue avec une telle empathie envers Cyprien, une telle justesse, qu’à travers elle, on arrive à croire à la situation. Léa n’est prisonnière d’aucun code, elle peut tout jouer. Elle dégage un vrai charme, une beauté naturelle, et j’aime son phrasé particulier. Elle est une des très belles rencontres de ce projet.
J’avais remarqué Laurent Stocker dans ENSEMBLE, C’EST TOUT de Claude Berri et j’espérais avoir l’occasion de tourner avec lui. Parallèlement, Elie, qui avait travaillé avec lui dans AUX ABOIS de Philippe Collin, y avait également pensé et lui avait même donné le scénario. Laurent a tout de suite accepté ce rôle, aux antipodes de ce qu’il fait habituellement. Le diriger consistait pour moi à créer un vrai méchant, avec un regard diabolique comme dans les années 70. Il a pris un plaisir fou à interpréter de manière incroyable ce personnage double, à la fois odieux et malheureux du manque d’amour de sa mère et de sa fiancée.
Pour le personnage de Kiki, le meilleur ami de Cyprien, il a été assez facile de créer une véritable complémentarité avec Elie, grâce à Vincent Desagnat. Il est physiquement très différent. Il s’est nettement détaché des nombreux acteurs que nous avons vus aux essais.
Dans mon dernier court métrage, j’avais travaillé avec Jean-Michel Lahmi, un comédien merveilleux dont je suis fan. Il est fabuleux dans le rôle de Godzilla, une vraie composition à laquelle il apporte son humour.
Quand les producteurs m’ont proposé Mouloud Achour, j’ai accepté avec enthousiasme parce qu’il apporte toujours quelque chose d’inattendu. Nous avons aussi la chance d’avoir Catherine Deneuve, la grande surprise du film. Pour ce rôle de Vivianne, nous voulions une comédienne impressionnante, dotée d’une aura incroyable. Elle est une icône, une star absolue, et l’avoir était un rêve. Je n’étais pas certain qu’elle accepterait le film. Lorsque nous nous sommes rencontrés, je suis arrivé avec plein de références, comme je le fais souvent. Je lui ai dit que j’imaginais le film non comme une farce, mais comme une comédie décalée. Je lui ai parlé de l’ambiance visuelle. Séduite, elle a donné sa réponse assez rapidement. Travailler avec elle a été un tel bonheur que nous continuons à nous voir. En tant que comédienne, elle a toujours pris beaucoup de risques. Très généreuse, elle donne beaucoup dans le travail. Tout cela fait une distribution assez surprenante.
Ce n’était pas trop difficile de travailler avec des acteurs aussi différents ?
Avant de commencer, j’étais un peu impressionné car même si je fais des films depuis longtemps, je n’avais jamais travaillé avec des acteurs aussi chevronnés. On a d’abord tourné avec Elie et Vincent, ce qui nous a permis de former un premier noyau. Dès le début, Elie et moi avons très bien fonctionné. Nous avions beaucoup travaillé sur le scénario en amont. Elie, très spontané, s’est montré très bon dès les premières prises. Il interprète deux personnages dont Jack Price, qu’il n’avait jamais joué. Cet autre versant de son rôle s’appuie directement sur Cyprien et se définit en étant son contraire. Au départ, nous avions envisagé des prothèses pour le transformer physiquement mais, à juste titre, Elie a refusé cette idée. Il nous a convaincus qu’il devait jouer ce rôle de composition à partir de sa propre personnalité. Ce n’était pas évident mais son travail sur l’attitude, la voix, son rythme est tellement maîtrisé que cela vaut tous les maquillages. Certaines autres scènes, comme celles où il passe ses soirées seul devant la télévision, ne f¡guraient pas dans le scénario. Elles ont été improvisées et apportent beaucoup au film. Lorsqu’il fallait associer plusieurs talents dans une même scène, les choses se corsaient un peu. Par exemple, entre Elie qui est bon dans les premières prises et Vincent qui monte en puissance après quelques-unes, il fallait trouver un équilibre. J’y suis allé progressivement. Léa est arrivée ensuite et là encore, tout s’est remarquablement passé. Lorsque Catherine a commencé, nous tournions déjà depuis plusieurs semaines. Nous nous étions vus plusieurs fois pour parler du personnage et du ton du film, mais sans faire de lecture. Son arrivée a fait de l’effet à toute l’équipe. Sur le plateau, tout le monde était impressionné. Malgré son statut et son expérience, elle est accessible, simple, très à l’écoute. Le travail a été si évident que j’en oubliais parfois que je tournais avec Catherine Deneuve !
L’univers de Cyprien est unique. Comment l’avez-vous construit ?
J’attache une grande importance à la direction artistique. J’avais la volonté d’apporter le même soin que celui qu’on peut trouver dans les films américains. Je travaille avec un directeur artistique, Mathieu Gardes, et au cours de la préparation je choisis les décors, les couleurs des stylismes car pour chaque scène, les vêtements devaient être en corrélation avec les couleurs du décor. Le cadre doit former un tout cohérent qui sert l’ambiance du film. Je souhaitais que les chefs de poste travaillent ensemble et par exemple, les choix de vêtements devaient être validés et par le décor et par la lumière. Sur le plateau, Mathieu faisait le lien entre tous. Je lui dois énormément car il a fait un travail remarquable jusqu’au moindre détail, particulièrement sur l’univers des «nerds». Il a rencontré de vrais collectionneurs pour que nous ayons des objets qui soient d’authentiques collectors. Le film est aussi construit sur des partis pris de mise en scène, avec des mouvements de caméra et des rythmes qui varient. Fan de Wes Anderson, je voulais vraiment une comédie très visuelle, dans un univers complet.
La bande originale revisite les années 80...
La musique participe au côté décalé du film. La bande originale est un réel choix de production. C’est un vrai catalogue sans concession. En tant que spectateur, cette bande son me fait tout de suite entrer dans l’histoire. À ma façon, je suis très années 80. C’est aussi le cinéma qu’apprécient les «nerds», et ce sont les musiques qui le représentent. Les spectateurs trentenaires vont les retrouver avec plaisir et les plus jeunes les découvriront et les apprécieront.
Ce ne sont pas les seuls clins d’oeil du film à cette époque...
On a essayé de multiplier les références visuelles, autant dans les affiches que dans les objets qui entourent Cyprien, qui proviennent de films phares comme Les Goonies, Wargames et bien sûr la Guerre des Etoiles . Toutes ces œuvres font partie de cette culture «pop corn» qui a émergé dans les années 80, et qui est une sorte de prolongement de l’univers des nerds. Le point incontournable chez eux, c’est leur rattachement à l’enfance, et donc, à ces œuvres très datées, qui figent une époque, et à laquelle le public pourra s’identifier. Et si ça peut en plus donner envie aux plus jeunes de découvrir ces films...
Certaines scènes ont-elles demandé un travail spécifique?
Le gros du travail a porté sur la fin du film, retravaillée avec les auteurs pour obtenir ce happy end décalé et que nous voulions plein de références et touchant. Il fallait aussi y introduire du second degré pour éviter que le film bascule dans un genre qui le réduirait.
Dans une scène vous faites porter des patins à glace à tout votre cast... Ça s’est passé comment?
La scène de la soirée sur glace a été la plus grande gageure techniquement. Nous avons tourné pendant près d’une semaine, sur une patinoire. Pour le personnage de Cyprien qui patine à merveille, la situation était une façon de s’imposer. Cette scène m’excitait et me faisait peur à la fois. Il a fallu recréer et adapter tous les systèmes de machinerie. Nous avions des pieds de caméra rotatifs spéciaux et les machinos portaient des chaussures à clous pour pousser les travellings. Rien que la chorégraphie a nécessité une centaine de figurants. Chacun savait que nous faisions quelque chose d’inhabituel. En plus, nous avions Catherine Deneuve sur glace ! Nous ne l’avons pas fait patiner mais c’est une vraie comédienne et elle semble plus «en patins» que n’importe qui ! Léa est une vraie patineuse qui a fait des concours de patinage dans sa jeunesse. Elie, qui sait faire du patin à roulettes, a pris des cours et a parfaitement assumé ces scènes pourtant peu évidentes. Au final, je crois que malgré la difficulté, cela valait la peine parce que la séquence est visuellement surprenante.
Alors, heureux ?
Je suis heureux de ce premier film et bien que n’étant pas à l’origine du projet, je trouve qu’il me ressemble. J’assume entièrement cette comédie décalée, touchante et romantique. Avoir un tel casting, bénéficier du talent d’Elie est une grande chance et une très belle expérience.
C’est quelque chose qui me tente depuis toujours et dès que j’ai pu, j’ai commencé par des courts métrages. À l’époque où tous mes copains s’intéressaient aux comédiens, j’étais déjà attiré par la mise en scène et j’adorais des réalisateurs comme Brian De Palma, Martin Scorcese, et les chefs opérateurs ! Le côté «derrière la caméra» m’a toujours passionné. J’ai réalisé quatre courts métrages. Dès le deuxième, je me suis dirigé vers la publicité et, pendant une dizaine d’années, j’ai réalisé près de 80 films publicitaires. Sur les plateaux, j’ai pu apprendre mon métier, les exigences qu’un réalisateur doit avoir et les batailles à mener pour défendre ses idées. La publicité est confortable mais elle ne me faisait pas oublier l’essentiel : le cinéma. Je suis donc revenu vers les courts métrages. Mon dernier court métrage, LE SECRET DE SALOMON, avec Lionel Abelanski, a été récompensé un peu partout et m’a ouvert des portes. C’est mon agent, Jean-François Gabard, qui m’a parlé de CYPRIEN. D’habitude, je travaille sur des projets que j’écris, mais là, l’histoire et les thèmes ont immédiatement trouvé un écho en moi. Il y avait aussi bien sûr l’envie de travailler avec Elie. J’ai rencontré les producteurs, Maxime Japy et Arthur, qui ont découvert mon travail, et nous sommes partis ensemble dans cette aventure.
Qu’est ce qui vous touche le plus dans l’histoire de Cyprien ?
Bien que je sois moi-même très entouré, le thème qui me touche d’abord est celui de la solitude. J’ai de l’affection pour ces personnages que l’on ne voit pas, auxquels on ne prête aucune attention. Même s’il a des copains, Cyprien vit dans sa bulle et ne trouve pas sa place dans le monde. Au-delà des thèmes, la personnalité d’Elie en elle-même me touche. Notre volonté d’émotion pouvait paraître paradoxale pour une comédie mais elle en était l’un des axes essentiels.
C’est quoi la «touche» David Charhon sur ce film ?
C’est un projet à plusieurs niveaux de lecture. Il valorise le talent d’Elie, il associe la comédie à quelque chose de plus humain et dès le départ, je souhaitais que l’univers visuel soit original et clairement défini. Comme tout réalisateur, à partir de l’excellent travail des scénaristes, il a fallu que je m’approprie le projet. J’ai donc commencé par l’adaptation des dialogues. J’ai appuyé le côté comédie romantique.
Cyprien est bien entouré... Comment s’est fait le choix ?
La gageure était de réunir un vrai casting de cinéma en oubliant que l’on part d’un personnage de one-man-show. Je souhaitais entourer Elie d’une distribution complètement décalée.
Léa Drucker a été notre premier choix. Elle apporte une véritable crédibilité au film, déclenchant des sentiments auxquels chacun peut se rattacher. Elle incarne la valeur étalon, la normalité de ce film. Elle joue avec une telle empathie envers Cyprien, une telle justesse, qu’à travers elle, on arrive à croire à la situation. Léa n’est prisonnière d’aucun code, elle peut tout jouer. Elle dégage un vrai charme, une beauté naturelle, et j’aime son phrasé particulier. Elle est une des très belles rencontres de ce projet.
J’avais remarqué Laurent Stocker dans ENSEMBLE, C’EST TOUT de Claude Berri et j’espérais avoir l’occasion de tourner avec lui. Parallèlement, Elie, qui avait travaillé avec lui dans AUX ABOIS de Philippe Collin, y avait également pensé et lui avait même donné le scénario. Laurent a tout de suite accepté ce rôle, aux antipodes de ce qu’il fait habituellement. Le diriger consistait pour moi à créer un vrai méchant, avec un regard diabolique comme dans les années 70. Il a pris un plaisir fou à interpréter de manière incroyable ce personnage double, à la fois odieux et malheureux du manque d’amour de sa mère et de sa fiancée.
Pour le personnage de Kiki, le meilleur ami de Cyprien, il a été assez facile de créer une véritable complémentarité avec Elie, grâce à Vincent Desagnat. Il est physiquement très différent. Il s’est nettement détaché des nombreux acteurs que nous avons vus aux essais.
Dans mon dernier court métrage, j’avais travaillé avec Jean-Michel Lahmi, un comédien merveilleux dont je suis fan. Il est fabuleux dans le rôle de Godzilla, une vraie composition à laquelle il apporte son humour.
Quand les producteurs m’ont proposé Mouloud Achour, j’ai accepté avec enthousiasme parce qu’il apporte toujours quelque chose d’inattendu. Nous avons aussi la chance d’avoir Catherine Deneuve, la grande surprise du film. Pour ce rôle de Vivianne, nous voulions une comédienne impressionnante, dotée d’une aura incroyable. Elle est une icône, une star absolue, et l’avoir était un rêve. Je n’étais pas certain qu’elle accepterait le film. Lorsque nous nous sommes rencontrés, je suis arrivé avec plein de références, comme je le fais souvent. Je lui ai dit que j’imaginais le film non comme une farce, mais comme une comédie décalée. Je lui ai parlé de l’ambiance visuelle. Séduite, elle a donné sa réponse assez rapidement. Travailler avec elle a été un tel bonheur que nous continuons à nous voir. En tant que comédienne, elle a toujours pris beaucoup de risques. Très généreuse, elle donne beaucoup dans le travail. Tout cela fait une distribution assez surprenante.
Ce n’était pas trop difficile de travailler avec des acteurs aussi différents ?
Avant de commencer, j’étais un peu impressionné car même si je fais des films depuis longtemps, je n’avais jamais travaillé avec des acteurs aussi chevronnés. On a d’abord tourné avec Elie et Vincent, ce qui nous a permis de former un premier noyau. Dès le début, Elie et moi avons très bien fonctionné. Nous avions beaucoup travaillé sur le scénario en amont. Elie, très spontané, s’est montré très bon dès les premières prises. Il interprète deux personnages dont Jack Price, qu’il n’avait jamais joué. Cet autre versant de son rôle s’appuie directement sur Cyprien et se définit en étant son contraire. Au départ, nous avions envisagé des prothèses pour le transformer physiquement mais, à juste titre, Elie a refusé cette idée. Il nous a convaincus qu’il devait jouer ce rôle de composition à partir de sa propre personnalité. Ce n’était pas évident mais son travail sur l’attitude, la voix, son rythme est tellement maîtrisé que cela vaut tous les maquillages. Certaines autres scènes, comme celles où il passe ses soirées seul devant la télévision, ne f¡guraient pas dans le scénario. Elles ont été improvisées et apportent beaucoup au film. Lorsqu’il fallait associer plusieurs talents dans une même scène, les choses se corsaient un peu. Par exemple, entre Elie qui est bon dans les premières prises et Vincent qui monte en puissance après quelques-unes, il fallait trouver un équilibre. J’y suis allé progressivement. Léa est arrivée ensuite et là encore, tout s’est remarquablement passé. Lorsque Catherine a commencé, nous tournions déjà depuis plusieurs semaines. Nous nous étions vus plusieurs fois pour parler du personnage et du ton du film, mais sans faire de lecture. Son arrivée a fait de l’effet à toute l’équipe. Sur le plateau, tout le monde était impressionné. Malgré son statut et son expérience, elle est accessible, simple, très à l’écoute. Le travail a été si évident que j’en oubliais parfois que je tournais avec Catherine Deneuve !
L’univers de Cyprien est unique. Comment l’avez-vous construit ?
J’attache une grande importance à la direction artistique. J’avais la volonté d’apporter le même soin que celui qu’on peut trouver dans les films américains. Je travaille avec un directeur artistique, Mathieu Gardes, et au cours de la préparation je choisis les décors, les couleurs des stylismes car pour chaque scène, les vêtements devaient être en corrélation avec les couleurs du décor. Le cadre doit former un tout cohérent qui sert l’ambiance du film. Je souhaitais que les chefs de poste travaillent ensemble et par exemple, les choix de vêtements devaient être validés et par le décor et par la lumière. Sur le plateau, Mathieu faisait le lien entre tous. Je lui dois énormément car il a fait un travail remarquable jusqu’au moindre détail, particulièrement sur l’univers des «nerds». Il a rencontré de vrais collectionneurs pour que nous ayons des objets qui soient d’authentiques collectors. Le film est aussi construit sur des partis pris de mise en scène, avec des mouvements de caméra et des rythmes qui varient. Fan de Wes Anderson, je voulais vraiment une comédie très visuelle, dans un univers complet.
La bande originale revisite les années 80...
La musique participe au côté décalé du film. La bande originale est un réel choix de production. C’est un vrai catalogue sans concession. En tant que spectateur, cette bande son me fait tout de suite entrer dans l’histoire. À ma façon, je suis très années 80. C’est aussi le cinéma qu’apprécient les «nerds», et ce sont les musiques qui le représentent. Les spectateurs trentenaires vont les retrouver avec plaisir et les plus jeunes les découvriront et les apprécieront.
Ce ne sont pas les seuls clins d’oeil du film à cette époque...
On a essayé de multiplier les références visuelles, autant dans les affiches que dans les objets qui entourent Cyprien, qui proviennent de films phares comme Les Goonies, Wargames et bien sûr la Guerre des Etoiles . Toutes ces œuvres font partie de cette culture «pop corn» qui a émergé dans les années 80, et qui est une sorte de prolongement de l’univers des nerds. Le point incontournable chez eux, c’est leur rattachement à l’enfance, et donc, à ces œuvres très datées, qui figent une époque, et à laquelle le public pourra s’identifier. Et si ça peut en plus donner envie aux plus jeunes de découvrir ces films...
Certaines scènes ont-elles demandé un travail spécifique?
Le gros du travail a porté sur la fin du film, retravaillée avec les auteurs pour obtenir ce happy end décalé et que nous voulions plein de références et touchant. Il fallait aussi y introduire du second degré pour éviter que le film bascule dans un genre qui le réduirait.
Dans une scène vous faites porter des patins à glace à tout votre cast... Ça s’est passé comment?
La scène de la soirée sur glace a été la plus grande gageure techniquement. Nous avons tourné pendant près d’une semaine, sur une patinoire. Pour le personnage de Cyprien qui patine à merveille, la situation était une façon de s’imposer. Cette scène m’excitait et me faisait peur à la fois. Il a fallu recréer et adapter tous les systèmes de machinerie. Nous avions des pieds de caméra rotatifs spéciaux et les machinos portaient des chaussures à clous pour pousser les travellings. Rien que la chorégraphie a nécessité une centaine de figurants. Chacun savait que nous faisions quelque chose d’inhabituel. En plus, nous avions Catherine Deneuve sur glace ! Nous ne l’avons pas fait patiner mais c’est une vraie comédienne et elle semble plus «en patins» que n’importe qui ! Léa est une vraie patineuse qui a fait des concours de patinage dans sa jeunesse. Elie, qui sait faire du patin à roulettes, a pris des cours et a parfaitement assumé ces scènes pourtant peu évidentes. Au final, je crois que malgré la difficulté, cela valait la peine parce que la séquence est visuellement surprenante.
Alors, heureux ?
Je suis heureux de ce premier film et bien que n’étant pas à l’origine du projet, je trouve qu’il me ressemble. J’assume entièrement cette comédie décalée, touchante et romantique. Avoir un tel casting, bénéficier du talent d’Elie est une grande chance et une très belle expérience.