Un médecin de Bukavu lauréat du prix de droits de l'Homme de l'ONU.


Par Lech Walassa Mulondani Rédigé le 22/12/2008 (dernière modification le 22/12/2008)

Une foule nombreuse a accueilli le samedi 20 décembre le docteur Denis MUKWEGE à son retour de New York au siège des Nations Unies où il est allé recevoir le 10 décembre le prix 2008 pour les droits de l'Homme


Le docteur Denis Mukwege vient de recevoir le prix des droits de l'Homme 2008 des Nations Unies. Il figure parmi les sept lauréats, conformément à la proclamation faite par le président de l'Assemblée générale des droits de l'Homme aux Nations Unies ce 26 Novembre dernier. Pour le Dr Denis Mukwege, les violences sexuelles dans la région sont considérées comme une arme de guerre qui détruit toute une communauté. Le Dr Mukwege est le seul lauréat congolais.

Qui est docteur Denis MUKWEGE?

"Je suis le docteur Denis MUKWEGE MUKENGERE, médecin, directeur de l’hôpital de Panzi." Ce pasteur protestant né à Bukavu en 1955 a été récompensé pour la prise en charge des victimes des violences sexuelles. "Je suis gynécologue-obstétricien et, à ce titre, depuis environ dix ans, je m’occupe de femmes victimes de violences sexuelles avec des lésions génitales graves, qui me sont adressées par les médecins d'autres structures." Ce chirurgien gynécologue congolais formé en France à Angers, s’occupe avec beaucoup de dévouement et d’abnégation (il ne demande aucun honoraire) de ces victimes.


Viol: arme de guerre.

Les violences sexuelles constituent un véritable drame que connaît le Sud Kivu depuis plusieurs années. Malheureusement, les victimes ont peur de leurs bourreaux et ne se présentent pas facilement à l’hôpital. Les groupes armés qui font la loi dans la région depuis plus d'une décennie utilisent le viol comme une arme de guerre. Ils violent les femmes et filles des communautés en conflits pour humilier leurs adversaires. En 2000, le docteur Mukwege effectue sa première prise en charge d’une victime de violences sexuelles. "Cette jeune personne, après avoir été violée par des hommes en uniforme, a subi des atrocités jusqu’à la destruction complète de son appareil génital par une arme à feu. Sa prise en charge n’était pas possible ailleurs car elle avait une destruction de la vessie, du vagin et du rectum. Nous l’avons accueillie à Bukavu et depuis les cas similaires se sont multipliés. Cette année nous avons comptabilisé plus de deux mille femmes prises en charge sur le plan chirurgical et médical. Toutes ces femmes ont été victimes de violences sexuelles dans des conditions particulières mais toutes ont besoin d’être soutenues."



Honte et solitude pour les victimes de viol.

Au début de la prise en charge, toutes les femmes violées sont animées par le même sentiment : celui d’être abandonnées et seules au monde. Elles se sentent abandonnées, tout d’abord par leur mari qui sont les premiers à les quitter puis en dernier lieu par leur mère quand celle-ci est encore en vie. Comme elles ont souvent des lésions urinaires et digestives, leur entourage ne supporte plus leurs odeurs. Le Docteur MUKWEGE affirme recevoir également des jeunes filles ou des enfants de 12, 13 ou 14 ans qui sont enceintes. Elles se retrouvent en pleine brousse sans assistance, elles sont mineures et souvent incapables d’accoucher seules. Lors des accouchements, quand elles survivent, elles se retrouvent avec des lésions graves.
"Je pense que les victimes de violences sexuelles devraient tout d’abord ne pas se culpabiliser et trouver des appuis pour avoir envie de reprendre goût à la vie. Nous devons les aider à pouvoir reprendre une vie normale. Je dois dire que la communauté internationale, que nous sommes tous en fait, devrait lutter contre ces violences faites aux femmes. Je trouve horrible que se soient les femmes qui paient un lourd tribut en subissant non seulement des violences sexuelles, mais en plus des mutilations lorsqu’il y a des guerres d’intérêts économiques. Je fais appel à tous les gouvernements pour prendre les mesures qui s’imposent pour faire arrêter ce type de pratiques pendant les guerres, que ce soit au Congo ou ailleurs. Avec ce prix décerné par les Nations Unies, j'estime que la communauté internationale a entendu notre voix. Nous avons, à ce titre, reçu un encouragement pour le travail que nous faisons. Nous n'allons pas baisser les bras." Selon Miguel D'Escoto Brockmann, c'est son dévouement pendant plus de 10 ans déjà au service des femmes et filles victimes de violences sexuelles dans la province qui lui a valu ce prix.

L'hôpital de Panzi traite les victimes des violences sexuelles de l'ancien Kivu: le Nord Kivu,le Sud Kivu et la province du Maniema en partenariat avec plusieurs organisations nationales et internationales. A ce jour plus de vingt mille victimes sont déjà passées par là. Il y en a encore des milliers dans la région car la guerre se poursuit notamment au Nord Kivu.






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