Pourquoi la colère gronde-t-elle dans les rues de Hong Kong?


Par Rédigé le 17/06/2019 (dernière modification le 18/06/2019)

Près d’une semaine après l’impressionnante manifestation dans les rues de Hong Kong, et les violences entre forces de l’ordre et manifestants des jours suivants, la mobilisation ne faiblit pas dans l’ex-colonie britannique, théâtre d’une forte agitation politique.


Deux millions de personnes dans les rues de Hong Kong le dimanche 16 juin 2019 (c) Sam Tsang/SCMP
Pour comprendre le mouvement de protestation actuel à Hong Kong, il faut revenir en arrière. Hong Kong a été une colonie britannique jusqu’au 1er juillet 1997, à la fin du bail entre l’Empire du Grand Qing et l’empire britannique. Le territoire a été rétrocédé à la Chine pour une durée de cinquante ans, sous un statut particulier de "Région administrative spéciale", en vertu du célèbre "un pays, deux systèmes".

En 2012, déjà, des manifestations avaient eu lieu lorsque le gouvernement avait tenté d’imposer un programme scolaire "national et moral" dans les écoles de Hong Kong, ventant les louanges du communisme et du nationalisme chinois.
Puis, en 2014, la révolte des parapluies des étudiants hongkongais paralysait les routes de l’île pendant plus de deux mois. Le mouvement pacifiste "Occupy Central", réclamait un véritable suffrage universel à Hong Kong, et avait mis en lumière l’attachement considérable du peuple à son autonomie et à sa démocratie, sans obtenir cependant la moindre concession de Pékin.

Carrie Lam, la cheffe de l'exécutif hongkongais s'exprime durant la conférence de presse du 15 juin 2019 (c) Reuters
En 2017, c’est Carrie Lam qui a été nommée à la tête de l’exécutif par une commission largement composée de loyalistes pro-Pékin. Première femme à accéder au poste de chef du gouvernement hongkongais, Carrie Lam a conservé une faible popularité depuis le début de son mandat.

Et le projet de loi visant à permettre des extraditions vers la Chine continentale a fait l’effet d’une bombe dans le port parfumé. Le texte, qui aurait concerné les sept millions d’habitants mais aussi les ressortissants étrangers, résidents ou de passage, était perçu par de nombreux Hongkongais comme une véritable menace pour l'Etat de droit, et jugé dangereux pour les droits de l’homme.

Les manifestants dans les rues de Hong Kong expriment leur colère (c) Thomas Peter/Reuters
Alors qu’un million de personnes s’étaient rassemblées dans la rue dimanche 9 juin pour demander la suspension du texte, la mobilisation a été encore plus forte dimanche 16 juin. Une marée humaine de près de deux millions de personnes (selon les organisateurs), vêtus de noir, et tenant pour certains des œillets blancs à la main, était bien décidée à maintenir la pression sur le gouvernement. Malgré l’annonce de la suspension pour une durée indéterminée du projet de loi et les excuses de Carrie Lam pour avoir causé "conflits et querelles", le peuple réclame la démission de la dirigeante de Hong Kong et la suppression totale du texte de loi.

Lundi 17 juin, le militant prodémocratie Joshua Wong, leader du mouvement de 2014, a été libéré par anticipation après près de cinq semaines d'emprisonnement pour ne pas avoir respecté une ordonnance judiciaire exigeant l’évacuation d’un campement érigé durant "Occupy Central". À sa sortie de prison, il a immédiatement exprimé son soutien aux manifestations et rejoint le mouvement de protestation : "Après avoir quitté la prison, je vais également me battre avec tous les Hongkongais contre la loi maléfique sur l'extradition vers la Chine".

La crainte et la colère des manifestants ne s’apaisent donc pas. La grogne exprime aussi le ressentiment beaucoup plus large de la population de Hong Kong contre Pékin, accusé de rogner depuis des années les libertés de l’un des territoires les plus riches de la planète.




Multiculturelle, curieuse, bavarde, et passionnée, mon coeur habite entre Hong Kong et Paris.… En savoir plus sur cet auteur


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