L'en-tête de la résolution. Photo (c) Isabelle Lépine
Oleg Sentsov est né en 1976 à Simferopol, en Crimée. Il est l’auteur de plusieurs films un peu expérimentaux à notoriété relativement confidentielle, mais il est surtout connu pour son engagement dans le mouvement de manifestations pro-européennes "Euromaïdan", qui a débuté le 21 novembre 2013, suite à la décision du gouvernement ukrainien de ne pas signer d’accord d'association avec l'Union européenne.
Sentsov a été arrêté en mai 2014 pour suspicion d’actes terroristes par les autorités russes, et condamné le 25 août 2015, "en violation du droit international et des normes élémentaires de justice, par un tribunal dont l’Union européenne ne reconnaît pas la compétence". Il purge, depuis, une peine de prison en Sibérie.
La position du Parlement européen intervient quelques semaines après qu’Oleg Sentsov ait annoncé, le 14 mai 2018, débuter une grève de la faim illimitée (qu’il sera contraint d’arrêter 145 jours plus tard, pour éviter d’être nourri de force). Le texte est aussi voté le jour même du lancement de la Coupe du monde de football en Russie, "pour condamner les violations des droits de l’homme et leur tentative de les dissimuler sous couvert de cette manifestation".
Dans cette résolution, le Parlement rappelle en effet que, dans le cas d’Oleg Sentsov, il y a eu des allégations de torture et de mauvais traitements "ayant conduit à lui arracher illégalement des dépositions auxquelles a plus tard été attribuée une valeur légale".
Oleg Sentsov a par ailleurs été jugé de façon abusive en tant que citoyen russe et en application du droit russe, alors qu’il est Ukrainien, et que les tribunaux russes, qu’ils soient militaires ou civils, "ne sont pas compétents pour juger des actes commis à l’extérieur du territoire internationalement reconnu de la Russie", c’est-à-dire pas en Crimée, dont l’annexion est jugée illégale par la Communauté internationale.
Pour ces différents motifs, mais aussi parce que, de façon générale, il condamne le non-respect de la démocratie, des droits de l’homme et de la liberté d’expression, ainsi que les conditions de détention "pénibles et inhumaines" des prisonniers, le Parlement européen demande la libération d’Oleg Sentsov et de tous les autres détenus politiques arbitrairement emprisonnés en Crimée et en Russie (158 auraient été recensés au 29 mai 2018).
Le Parlement évoque également la situation en Tchétchénie, et le cas d’Oyoub Titiev, le responsable de l’antenne locale du centre des droits de l’homme "Memorial", arrêté le 9 janvier 2018 et inculpé pour détention de stupéfiants. Une accusation rejetée par l’accusé et "fabriquée de toutes pièces selon les organisations non gouvernementales (ONG) et divers défenseurs des droits de l’homme".
De façon générale, le Parlement européen fait part de sa profonde inquiétude "face au contexte alarmant où des journalistes indépendants et des défenseurs des droits de l’homme qui travaillent en Russie sont la cible d’une série d’arrestations, d’attaques, d’intimidations et d’actes visant à les discréditer, en particulier en Tchétchénie". Les avocats qui apportent une aide juridique aux personnes arrêtées sont également visés. Les ONG qui perçoivent des subventions de l’étranger doivent s’inscrire sur une liste gouvernementale, qui les conduit à faire l’objet d’une surveillance étroite de leurs activités et à devoir spécifier dans leurs publications, rapports et communiqués de presse, que ces documents ont été produits par des "agents étrangers". En Crimée, les libertés de réunion, d’expression, d’association, d’accès à l’information et de religion, ont été limitées. Des signalements crédibles de cas d’intimidation, de disparitions forcées et de torture ont été rapportés et y sont désormais monnaie courante. La question de la minorité tatare, enfin, et des persécutions dont elle fait l’objet, est particulièrement préoccupante également.
Le Parlement européen insiste sur l’importance qu’il y a à ce que les militants de la société civile puissent exercer partout leur liberté de pensée et d’expression, en tant que droits les plus fondamentaux. Il rappelle que la Russie a été condamnée dans de nombreuses affaires par la Cour européenne des droits de l’homme, mais qu’elle ne s’est pas conformée aux arrêts rendus. Pourtant, la Fédération de Russie, en tant que membre à part entière du Conseil de l’Europe, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’Organisation des Nations unies, s’est engagée à respecter les principes de la démocratie, de l’état de droit ainsi que les libertés fondamentales et les droits de l’homme. Elle est aussi signataire de la Convention européenne des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Le Parlement rappelle la Russie à ses obligations, et insiste sur le fait que toutes les personnes détenues devraient avoir le droit de disposer d’une assistance juridique, de voir leurs familles et leurs représentants diplomatiques, et de recevoir au besoin des soins médicaux. Il enjoint les autorités russes et les services compétents à "porter une attention appropriée aux personnes emprisonnées et à respecter l’éthique médicale, notamment à s’abstenir de les alimenter de force ou à leur imposer tout traitement non sollicité pouvant relever de la torture et d’autres formes de mauvais traitement".
Les observateurs internationaux, pour terminer, devraient pouvoir conduire, sans condition ni restriction, leurs missions de suivi de la situation des droits de l’homme, notamment en Crimée, et prendre les dispositions adaptées lorsqu’elles s’imposent.
En vertu de tous ces éléments, le Parlement demande à la Commission et au Conseil de l’UE que les sanctions contre la Russie soient prolongées, et que soient envisagées des mesures ciblées "visant des personnes responsables de la détention et des procès concernant des prisonniers politiques".
"P8_TA(2018)0259" est la nomenclature de cette résolution. A quelques mois des législatives européennes, vote généralement "boudé" par les électeurs, il était bon de revenir sur ce genre de prise de position en faveur de la démocratie, des droits de l’homme et de la liberté d’expression, pour rappeler ou faire savoir que le Parlement européen, c’est aussi cela…i[
Sentsov a été arrêté en mai 2014 pour suspicion d’actes terroristes par les autorités russes, et condamné le 25 août 2015, "en violation du droit international et des normes élémentaires de justice, par un tribunal dont l’Union européenne ne reconnaît pas la compétence". Il purge, depuis, une peine de prison en Sibérie.
La position du Parlement européen intervient quelques semaines après qu’Oleg Sentsov ait annoncé, le 14 mai 2018, débuter une grève de la faim illimitée (qu’il sera contraint d’arrêter 145 jours plus tard, pour éviter d’être nourri de force). Le texte est aussi voté le jour même du lancement de la Coupe du monde de football en Russie, "pour condamner les violations des droits de l’homme et leur tentative de les dissimuler sous couvert de cette manifestation".
Dans cette résolution, le Parlement rappelle en effet que, dans le cas d’Oleg Sentsov, il y a eu des allégations de torture et de mauvais traitements "ayant conduit à lui arracher illégalement des dépositions auxquelles a plus tard été attribuée une valeur légale".
Oleg Sentsov a par ailleurs été jugé de façon abusive en tant que citoyen russe et en application du droit russe, alors qu’il est Ukrainien, et que les tribunaux russes, qu’ils soient militaires ou civils, "ne sont pas compétents pour juger des actes commis à l’extérieur du territoire internationalement reconnu de la Russie", c’est-à-dire pas en Crimée, dont l’annexion est jugée illégale par la Communauté internationale.
Pour ces différents motifs, mais aussi parce que, de façon générale, il condamne le non-respect de la démocratie, des droits de l’homme et de la liberté d’expression, ainsi que les conditions de détention "pénibles et inhumaines" des prisonniers, le Parlement européen demande la libération d’Oleg Sentsov et de tous les autres détenus politiques arbitrairement emprisonnés en Crimée et en Russie (158 auraient été recensés au 29 mai 2018).
Le Parlement évoque également la situation en Tchétchénie, et le cas d’Oyoub Titiev, le responsable de l’antenne locale du centre des droits de l’homme "Memorial", arrêté le 9 janvier 2018 et inculpé pour détention de stupéfiants. Une accusation rejetée par l’accusé et "fabriquée de toutes pièces selon les organisations non gouvernementales (ONG) et divers défenseurs des droits de l’homme".
De façon générale, le Parlement européen fait part de sa profonde inquiétude "face au contexte alarmant où des journalistes indépendants et des défenseurs des droits de l’homme qui travaillent en Russie sont la cible d’une série d’arrestations, d’attaques, d’intimidations et d’actes visant à les discréditer, en particulier en Tchétchénie". Les avocats qui apportent une aide juridique aux personnes arrêtées sont également visés. Les ONG qui perçoivent des subventions de l’étranger doivent s’inscrire sur une liste gouvernementale, qui les conduit à faire l’objet d’une surveillance étroite de leurs activités et à devoir spécifier dans leurs publications, rapports et communiqués de presse, que ces documents ont été produits par des "agents étrangers". En Crimée, les libertés de réunion, d’expression, d’association, d’accès à l’information et de religion, ont été limitées. Des signalements crédibles de cas d’intimidation, de disparitions forcées et de torture ont été rapportés et y sont désormais monnaie courante. La question de la minorité tatare, enfin, et des persécutions dont elle fait l’objet, est particulièrement préoccupante également.
Le Parlement européen insiste sur l’importance qu’il y a à ce que les militants de la société civile puissent exercer partout leur liberté de pensée et d’expression, en tant que droits les plus fondamentaux. Il rappelle que la Russie a été condamnée dans de nombreuses affaires par la Cour européenne des droits de l’homme, mais qu’elle ne s’est pas conformée aux arrêts rendus. Pourtant, la Fédération de Russie, en tant que membre à part entière du Conseil de l’Europe, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et de l’Organisation des Nations unies, s’est engagée à respecter les principes de la démocratie, de l’état de droit ainsi que les libertés fondamentales et les droits de l’homme. Elle est aussi signataire de la Convention européenne des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
Le Parlement rappelle la Russie à ses obligations, et insiste sur le fait que toutes les personnes détenues devraient avoir le droit de disposer d’une assistance juridique, de voir leurs familles et leurs représentants diplomatiques, et de recevoir au besoin des soins médicaux. Il enjoint les autorités russes et les services compétents à "porter une attention appropriée aux personnes emprisonnées et à respecter l’éthique médicale, notamment à s’abstenir de les alimenter de force ou à leur imposer tout traitement non sollicité pouvant relever de la torture et d’autres formes de mauvais traitement".
Les observateurs internationaux, pour terminer, devraient pouvoir conduire, sans condition ni restriction, leurs missions de suivi de la situation des droits de l’homme, notamment en Crimée, et prendre les dispositions adaptées lorsqu’elles s’imposent.
En vertu de tous ces éléments, le Parlement demande à la Commission et au Conseil de l’UE que les sanctions contre la Russie soient prolongées, et que soient envisagées des mesures ciblées "visant des personnes responsables de la détention et des procès concernant des prisonniers politiques".
"P8_TA(2018)0259" est la nomenclature de cette résolution. A quelques mois des législatives européennes, vote généralement "boudé" par les électeurs, il était bon de revenir sur ce genre de prise de position en faveur de la démocratie, des droits de l’homme et de la liberté d’expression, pour rappeler ou faire savoir que le Parlement européen, c’est aussi cela…i[