Michel Barnier au SSF. Photo prise par l'auteur.
Michel Barnier, ancien ministre et commissaire européen, nommé en 2016 négociateur en chef du Brexit, était à Paris jeudi 16 novembre 2017 pour un double exercice. A l’Assemblée nationale tout d’abord pour rendre compte devant les députés de l’état d’avancement des négociations du Brexit. Puis, en fin de journée, au Conservatoire National des Arts et Métiers, devant un amphithéâtre bondé dans le cadre du forum européen. A l’invitation de Nicole Gnesotto, professeur titulaire de la chaire "Union européenne" au CNAM, il venait s’exprimer sur les nouveaux enjeux européens.
Angela Merkel a dit, il y a peu, que l’avenir de l’Europe est bien plus important que le Brexit. C’est là tout l’enjeu actuel. Pas question pour nous de faire une politique européenne en regardant sans cesse dans le rétroviseur, avec nostalgie. Nostalgie d’une Europe qui n’existe plus dans un contexte géopolitique mondial qui est bien différent aujourd'hui de ce qu’il était quelques décennies en arrière. Cette rengaine du "c’était mieux avant" entonnée par nombre de politiciens à l’Est comme à l’Ouest de l’Europe qui a mené au vote britannique pour le Brexit, porté Marine le Pen au second tour de l’élection présidentielle française, qui a récemment fait entrer l’extrême droite au Bundestag allemand ou qui alimente dangereusement les nationalismes et les populismes en Pologne et en Hongrie.
Il s’agit aujourd’hui de préparer et de prendre les bonnes décisions pour demain. Nous vivons dans un monde très inégalitaire où 900 millions d’êtres humains vivent avec moins de deux dollars par jour. Ici même en Europe nombreux sont ceux qui vivent sous le seuil de pauvreté et l’Afrique est un continent quasiment sans électricité. Ces populations se sentent totalement abandonnées. La pauvreté sert de terreau à tous les extrémismes et au terrorisme. Là-bas mais aussi chez nous.
L’impossible équation européenne est à replacer dans ce contexte. L’Europe c’est 3% du territoire du globe, 6% de la population mondiale, 23% de la richesse mondiale, 50% des dépenses sociales du monde et 56% de l’aide publique mondiale. Mais les puissances européennes sont de plus en plus marginalisées.
En 2015, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France se situaient respectivement à la 4ème, 5ème et 6ème places des puissances mondiales. En 2050, seule l’Allemagne figurera encore dans ce top 10 et aura rétrogradé à la 9ème place. Dans le cadre d’une Europe à 27, l’UE est à la seconde place en 2015 juste derrière les États-Unis. En 2050, l’UE se retrouvera à la 4ème place, le Royaume-Uni sera sorti du classement et n’aura donc plus voix au chapitre. Si nous ne sommes pas ensemble nous serons sous influence des grandes puissances de demain que seront les États-Unis, la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie entre autres.
Alors le choix est le suivant: une Europe souveraine, puissance économique qui n’abandonne pas pour autant ses valeurs sociales et ses objectifs environnementaux, ou une Europe impuissante réduite à l’état de sous-traitant.
"Il faut savoir être Européen en plus d’être patriote". C'est le leitmotiv de Michel Barnier. La promesse de paix des pères fondateurs de l’Europe a été tenue. Mais cette paix est fragile. Barack Obama, lors de son discours de Hanovre le 25 avril 2016, a rendu un vibrant hommage à l’intégration européenne comme "la plus grande entreprise de l’ère moderne" et il a plaidé pour un vieux continent fort et uni dans sa diversité. Il n’y a pas d’autre exemple équivalent à cette union d’États nation prônant un modèle démocratique, économique et social. L’Europe tient à son modèle mis en place depuis plus de 70 ans et aux valeurs qui l’accompagnent. Et pas question de céder sur ces modèles parce que le Royaume-Uni a décidé de sortir de l’Union. Nous ne pourrons accepter de dumping social ou financier dans le cadre du Brexit d’où l’importance d’arriver à un accord sur ce divorce. Le règlement du divorce permettra par la suite de mettre en place un nouvel accord bilatéral afin de gérer au mieux les relations entre l’Union européenne et le Royaume-Uni (qui, de fait, deviendra un État tiers le 29 mars 2019 conformément à la décision du gouvernement britannique).
Aujourd’hui encore beaucoup de questions restent en suspens dont la sécurisation des droits des citoyens européens vivant sur le sol britannique ainsi que le problème de la frontière en Irlande (il n’est pas pensable de rétablir une frontière dure entre l’Ulster et l’Éire même s’il faudra tout de même prévoir des contrôles).
Paradoxalement le Brexit a eu un effet contraire à celui attendu, ou espéré par certains. Au lieu d’affaiblir la construction européenne, la tendance est à ressouder les liens entre les 27 même si les divergences restent fortes particulièrement avec quelques pays d’Europe de l’Est comme la Pologne et la Hongrie. Mais malgré des divergences, début novembre la Première ministre polonaise, Beata Szydło, affirmait qu’il n’était pas question d'un Polexit.
L’impulsion donnée par l’élection d’Emmanuel Macron et la solidité du couple franco-allemand sont des signaux forts.
Au-delà d’une analyse pointue de la situation et des enjeux auxquels nous sommes confrontés, c’est un vibrant plaidoyer que nous livre Michel Barnier. Plaidoyer qu’il a renouvelé ce dimanche 19 novembre 2017 devant un parterre de près de 2.000 personnes, laïques et religieux, à l’occasion de la session annuelle des Semaines Sociales de France et salué par une longue "standing ovation". Un plaidoyer pour "une Europe des nations contre une Europe des nationalismes".
Angela Merkel a dit, il y a peu, que l’avenir de l’Europe est bien plus important que le Brexit. C’est là tout l’enjeu actuel. Pas question pour nous de faire une politique européenne en regardant sans cesse dans le rétroviseur, avec nostalgie. Nostalgie d’une Europe qui n’existe plus dans un contexte géopolitique mondial qui est bien différent aujourd'hui de ce qu’il était quelques décennies en arrière. Cette rengaine du "c’était mieux avant" entonnée par nombre de politiciens à l’Est comme à l’Ouest de l’Europe qui a mené au vote britannique pour le Brexit, porté Marine le Pen au second tour de l’élection présidentielle française, qui a récemment fait entrer l’extrême droite au Bundestag allemand ou qui alimente dangereusement les nationalismes et les populismes en Pologne et en Hongrie.
Il s’agit aujourd’hui de préparer et de prendre les bonnes décisions pour demain. Nous vivons dans un monde très inégalitaire où 900 millions d’êtres humains vivent avec moins de deux dollars par jour. Ici même en Europe nombreux sont ceux qui vivent sous le seuil de pauvreté et l’Afrique est un continent quasiment sans électricité. Ces populations se sentent totalement abandonnées. La pauvreté sert de terreau à tous les extrémismes et au terrorisme. Là-bas mais aussi chez nous.
L’impossible équation européenne est à replacer dans ce contexte. L’Europe c’est 3% du territoire du globe, 6% de la population mondiale, 23% de la richesse mondiale, 50% des dépenses sociales du monde et 56% de l’aide publique mondiale. Mais les puissances européennes sont de plus en plus marginalisées.
En 2015, l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France se situaient respectivement à la 4ème, 5ème et 6ème places des puissances mondiales. En 2050, seule l’Allemagne figurera encore dans ce top 10 et aura rétrogradé à la 9ème place. Dans le cadre d’une Europe à 27, l’UE est à la seconde place en 2015 juste derrière les États-Unis. En 2050, l’UE se retrouvera à la 4ème place, le Royaume-Uni sera sorti du classement et n’aura donc plus voix au chapitre. Si nous ne sommes pas ensemble nous serons sous influence des grandes puissances de demain que seront les États-Unis, la Chine, l’Inde, le Brésil, la Russie entre autres.
Alors le choix est le suivant: une Europe souveraine, puissance économique qui n’abandonne pas pour autant ses valeurs sociales et ses objectifs environnementaux, ou une Europe impuissante réduite à l’état de sous-traitant.
"Il faut savoir être Européen en plus d’être patriote". C'est le leitmotiv de Michel Barnier. La promesse de paix des pères fondateurs de l’Europe a été tenue. Mais cette paix est fragile. Barack Obama, lors de son discours de Hanovre le 25 avril 2016, a rendu un vibrant hommage à l’intégration européenne comme "la plus grande entreprise de l’ère moderne" et il a plaidé pour un vieux continent fort et uni dans sa diversité. Il n’y a pas d’autre exemple équivalent à cette union d’États nation prônant un modèle démocratique, économique et social. L’Europe tient à son modèle mis en place depuis plus de 70 ans et aux valeurs qui l’accompagnent. Et pas question de céder sur ces modèles parce que le Royaume-Uni a décidé de sortir de l’Union. Nous ne pourrons accepter de dumping social ou financier dans le cadre du Brexit d’où l’importance d’arriver à un accord sur ce divorce. Le règlement du divorce permettra par la suite de mettre en place un nouvel accord bilatéral afin de gérer au mieux les relations entre l’Union européenne et le Royaume-Uni (qui, de fait, deviendra un État tiers le 29 mars 2019 conformément à la décision du gouvernement britannique).
Aujourd’hui encore beaucoup de questions restent en suspens dont la sécurisation des droits des citoyens européens vivant sur le sol britannique ainsi que le problème de la frontière en Irlande (il n’est pas pensable de rétablir une frontière dure entre l’Ulster et l’Éire même s’il faudra tout de même prévoir des contrôles).
Paradoxalement le Brexit a eu un effet contraire à celui attendu, ou espéré par certains. Au lieu d’affaiblir la construction européenne, la tendance est à ressouder les liens entre les 27 même si les divergences restent fortes particulièrement avec quelques pays d’Europe de l’Est comme la Pologne et la Hongrie. Mais malgré des divergences, début novembre la Première ministre polonaise, Beata Szydło, affirmait qu’il n’était pas question d'un Polexit.
L’impulsion donnée par l’élection d’Emmanuel Macron et la solidité du couple franco-allemand sont des signaux forts.
Au-delà d’une analyse pointue de la situation et des enjeux auxquels nous sommes confrontés, c’est un vibrant plaidoyer que nous livre Michel Barnier. Plaidoyer qu’il a renouvelé ce dimanche 19 novembre 2017 devant un parterre de près de 2.000 personnes, laïques et religieux, à l’occasion de la session annuelle des Semaines Sociales de France et salué par une longue "standing ovation". Un plaidoyer pour "une Europe des nations contre une Europe des nationalismes".