Personne ne contestera l’antisémitisme du "spectacle" de Dieudonné. Aucun doute n’est permis à l’audition de son one-man-show "Le mur", enregistré clandestinement par deux journalistes du "Point" et mis en ligne sur le site de l’hebdomadaire. Personne ne reprochera non plus à Manuel Valls son "acte" politique nourri de conviction: cela venait à manquer chez nos responsables plus enclins, moyennant quelques compromissions, à la sauvegarde de la paix sociale. Condamner et combattre, certes. Mais cela suffit-il?
Réduire les propos de "l’humoriste" à la seule détestation d’un monothéisme serait une erreur. Outre le fait de puiser dans le registre de l’homophobie, Dieudonné se présente aussi en détracteur virulent du système politique: manœuvre habile destinée à éclipser le pire et à habiller l’inacceptable sous le masque d’une dénonciation radicale de la "duplicité sur laquelle semble reposer la société existante", écrivait déjà avec justesse la philosophe Hannah Arendt ("Les origines du totalitarisme", une société sans classes, Gallimard, Coll. "Quarto", 2002, pp. 611-654). Sans l’arsenal offert par ces mises en accusation explicites, quelle "irrésistible séduction" ce personnage pourrait-il encore exercer sur ceux et celles qui, pourtant éloignés de la "haine du juif", l’adulent et se pressent à ses représentations? Un passage du texte d’Hannah Arendt mérite d’être cité in extenso: "puisque la bourgeoisie prétendait être la garante des traditions occidentales et brouillait tous les problèmes moraux en faisant publiquement étalage de vertus que non seulement elle ne possédait pas, mais qu’en réalité elle méprisait, il parut révolutionnaire d’admettre la cruauté, le mépris des valeurs humaines et l’absence générale de moralité".
Réduire les propos de "l’humoriste" à la seule détestation d’un monothéisme serait une erreur. Outre le fait de puiser dans le registre de l’homophobie, Dieudonné se présente aussi en détracteur virulent du système politique: manœuvre habile destinée à éclipser le pire et à habiller l’inacceptable sous le masque d’une dénonciation radicale de la "duplicité sur laquelle semble reposer la société existante", écrivait déjà avec justesse la philosophe Hannah Arendt ("Les origines du totalitarisme", une société sans classes, Gallimard, Coll. "Quarto", 2002, pp. 611-654). Sans l’arsenal offert par ces mises en accusation explicites, quelle "irrésistible séduction" ce personnage pourrait-il encore exercer sur ceux et celles qui, pourtant éloignés de la "haine du juif", l’adulent et se pressent à ses représentations? Un passage du texte d’Hannah Arendt mérite d’être cité in extenso: "puisque la bourgeoisie prétendait être la garante des traditions occidentales et brouillait tous les problèmes moraux en faisant publiquement étalage de vertus que non seulement elle ne possédait pas, mais qu’en réalité elle méprisait, il parut révolutionnaire d’admettre la cruauté, le mépris des valeurs humaines et l’absence générale de moralité".
Le triste exemple du refus de lever l'immunité parlementaire de Serge Dassault
La manière la plus efficace d’anéantir le fonds de commerce de Dieudonné, tout comme celui d’autres formations politiques sur la même ligne, ne consiste-t-elle pas à les priver des ressources que leur accordent, sans frais, les graves défaillances et autres "hypocrisies" politiques? Et, ainsi, à les contraindre à ne pouvoir recourir et montrer que l’inadmissible? Prenons, en raison de sa concomitance dans l’actualité, un –triste– exemple: le refus par le Sénat de lever l’immunité parlementaire de Serge Dassault ravitaille sans effort d’argumentaire les troupes de Dieudonné. Soutenir ce dernier, envers et contre tous, les conforte, à lire encore l'auteure de "Eichmann à Jérusalem" dans leur "sentiment d’être pris sans cesse aux pièges multiples de la société", les sauve de "l’identification automatique avec la banalité" et avive leur prétention à "accéder à l’histoire, même au prix de l’autodestruction".