Ce qui surprend -et irrite- dans cette triste affaire, c’est la sidération psychologique des institutions, tétanisées devant l’insupportable et l’indicible. Institutions qui semblent méconnaître les enseignements issus de la psychanalyse d’enfants. Et ce, même si le psy ne doit pas se substituer à la justice: chacun son métier.
Ont-ils jamais entendu parler de la psyché infantile? A croire qu’ils ont été -inconsciemment- terrorisés à l’idée de se confronter à l’insoutenable vérité. A lire les informations sur la manière dont s’est déroulée le 23 juillet 2008, l’audition par les institutions judiciaires de la petite Marina, une enfant de sept ans maltraitée par ses parents, on reste confondu par l’absence de réaction: une véritable tétanisation psychologique. Une sidération paralysante.
Qu’attendaient donc ceux ou celles qui ont constaté durant les quarante minutes d’entretien filmé, les traces de coups, les marques de brûlure et les cicatrices de blessure? Une confession en bonne et due forme de la fillette? Espéraient-ils qu’elle désignât avec toute la rationalité froide de la douleur, ses propres géniteurs comme les coupables des exactions dont son corps portait l’outrance du témoignage? N’ont-ils pas entendu qu’elle a déclaré "vouloir devenir gendarme"? Un appel de détresse sans doute. Ne pouvaient-ils pas s’interroger sur l’hystérie de ses "éclats de rire en cascade" alors qu’on lui mentionnait ses "chutes" à répétition? C’est peut-être drôle à en "mourir"! Pourquoi les mêmes ont-ils été incapables de saisir la signifiance du fantasme salvateur de l’enfant qui évoque, comme dans une rêverie diurne, "sa nouvelle maison où l’on va faire une chambre pour moi toute seule"?
Ont-ils jamais entendu parler de la psyché infantile? A croire qu’ils ont été -inconsciemment- terrorisés à l’idée de se confronter à l’insoutenable vérité. A lire les informations sur la manière dont s’est déroulée le 23 juillet 2008, l’audition par les institutions judiciaires de la petite Marina, une enfant de sept ans maltraitée par ses parents, on reste confondu par l’absence de réaction: une véritable tétanisation psychologique. Une sidération paralysante.
Qu’attendaient donc ceux ou celles qui ont constaté durant les quarante minutes d’entretien filmé, les traces de coups, les marques de brûlure et les cicatrices de blessure? Une confession en bonne et due forme de la fillette? Espéraient-ils qu’elle désignât avec toute la rationalité froide de la douleur, ses propres géniteurs comme les coupables des exactions dont son corps portait l’outrance du témoignage? N’ont-ils pas entendu qu’elle a déclaré "vouloir devenir gendarme"? Un appel de détresse sans doute. Ne pouvaient-ils pas s’interroger sur l’hystérie de ses "éclats de rire en cascade" alors qu’on lui mentionnait ses "chutes" à répétition? C’est peut-être drôle à en "mourir"! Pourquoi les mêmes ont-ils été incapables de saisir la signifiance du fantasme salvateur de l’enfant qui évoque, comme dans une rêverie diurne, "sa nouvelle maison où l’on va faire une chambre pour moi toute seule"?
Culpabilité intériorisée de l'enfant d'avoir à 'balancer' l'un de ses parents
La petite Marina a menti pour protéger ses parents maltraitants. Quelle stupéfiante découverte! Ne sait-on pas, comme l’illustrent les multiples cas de divorce avec violence actée, l’ambivalence extrême de ces tout-petits qui refusent de choisir ou d’afficher leur préférence pour vivre avec le père ou la mère? L’expérience de la clinique d’enfant n’enseigne-t-elle pas la douloureuse culpabilité intériorisée de l’enfant d’avoir à "balancer" l’un de ses parents nonobstant tout ce qu’il endure? Indicible souffrance qui réinterprète la violence en preuve d’amour. Comment Marina aurait-elle pu revivre l’angoisse de séparation et de détresse -le Hilflosigkeit- en faisant arrêter celui et celle qui, malgré tout, prenaient soin d’elle depuis sa naissance?
Une de mes petites patientes, témoin de la violence de son père qui avait menacé sa mère avec un couteau au cours d’une dispute, ne dessinait-elle pas son corps minuscule dans un coin de la feuille A4 tout en le dotant d’une tête gigantesque. Et l’enfant d’expliquer que cette "tête contenait trop de choses difficiles à dire". Que dire d’une autre d’à peine six ans victime supposée d’un attouchement sexuel de son père et qui ne peut qu’énoncer: "mon cerveau est énervé: il voudrait que je sache". Avant d’ajouter dès la première séance: "je n’arrive pas à m’exprimer non pas parce que je n’ai pas le vocabulaire mais parce que le sujet est difficile. Trop difficile". Un autre de deux ans et demi prend la figurine que je lui façonne en pâte à modeler et lui "casse la tête". Il me tend ensuite les morceaux et me demande de les "reconstituer". Ou une petite de quatre ans dont la mère a été retrouvée dans une mare de sang après des coups portés par son compagnon: elle frappe avec une énergie inouïe la pâte à modeler comme pour tenter d’extirper de sa psyché la violence dont elle a été le témoin.
Récemment une mamie prend un rendez-vous pour son petit-fils de treize ans, en "soudain échec scolaire" et qui se déclare "malheureux". La veille de la séance, la mère annule: "il viendra vous voir lorsque "nous" irons mieux". Inquiétante étrangeté de l’humain envers ses souffrances.
Une de mes petites patientes, témoin de la violence de son père qui avait menacé sa mère avec un couteau au cours d’une dispute, ne dessinait-elle pas son corps minuscule dans un coin de la feuille A4 tout en le dotant d’une tête gigantesque. Et l’enfant d’expliquer que cette "tête contenait trop de choses difficiles à dire". Que dire d’une autre d’à peine six ans victime supposée d’un attouchement sexuel de son père et qui ne peut qu’énoncer: "mon cerveau est énervé: il voudrait que je sache". Avant d’ajouter dès la première séance: "je n’arrive pas à m’exprimer non pas parce que je n’ai pas le vocabulaire mais parce que le sujet est difficile. Trop difficile". Un autre de deux ans et demi prend la figurine que je lui façonne en pâte à modeler et lui "casse la tête". Il me tend ensuite les morceaux et me demande de les "reconstituer". Ou une petite de quatre ans dont la mère a été retrouvée dans une mare de sang après des coups portés par son compagnon: elle frappe avec une énergie inouïe la pâte à modeler comme pour tenter d’extirper de sa psyché la violence dont elle a été le témoin.
Récemment une mamie prend un rendez-vous pour son petit-fils de treize ans, en "soudain échec scolaire" et qui se déclare "malheureux". La veille de la séance, la mère annule: "il viendra vous voir lorsque "nous" irons mieux". Inquiétante étrangeté de l’humain envers ses souffrances.