Paula Modersohn-Becker, l'intensité d'un regard
Depuis le 8 avril et jusqu'au 21 août 2016, le MAMVP présente une exposition, la première consacrée en France à ce peintre allemand. Selon Julia Garimorth, qui en est le commissaire "Il est important que cette artiste revienne à Paris, la ville qui l’a toujours fascinée". Elle y a effectué quatre séjours à partir du 1er janvier 1900, abandonnant famille et plus tard mari, et y a suivi les cours de l'Académie Colarossi à Montparnasse.
Sa courte carrière, moins de quinze ans, comporte quand même quelque 750 toiles et plus de mille dessins qui font d'elle une figure importante de l’art moderne. C'est ce que pourra découvrir le visiteur grâce à la centaine de peintures et dessins exposés, portraits de mères et d’enfants, jeunes filles, garçonnets avec des chats dans leurs bras, paysages et natures mortes.
Née le 8 février 1876 à Dresde, formée à Berlin, Paula Becker qui épousera en 1901 le peintre Otto Modersohn. On ne pourra pas dire qu'il l'avait comprise puisqu'il n'hésita pas à déclarer "Elle tombe dans le travers de tout rendre grossier, laid, bizarre, comme en bois". Elle rejoint Worpswede, actuellement en Basse-Saxe, sorte de Barbizon allemand, à une vingtaine de km de Brême. Depuis 1889, quelques peintres et écrivains y avaient établi une communauté artistique désireuse de s'éloigner de la peinture académique, en s'inspirant de l’École française impressionniste. Elle en part rapidement pour se rendre à plusieurs reprises à Paris où elle découvre Auguste Rodin, Cézanne, Paul Gauguin, le Douanier Rousseau, Pablo Picasso, Henri Matisse, Maurice Denis ou Édouard Vuillard.
Elle fréquentera assidûment les salles du Louvre et c'est là qu'elle découvrira les peintures funéraires égyptiennes du Fayoum qui influencèrent tant ses portraits postérieurs. Il faut croire que la technique de l'artiste avait dû sembler audacieuse car plusieurs de ses toiles furent présentées lors de l’exposition sur l'Art dégénéré organisée à Munich, de juin à novembre 1937. Et Julia Garimorth de préciser "Elle a cassé les tabous avec ses représentations de mère à l'enfant aux antipodes des tableaux religieux de Madones. Comme elle était inconnue, elle expérimentait sans arrêt, sans crainte. Peut-être qu'un homme n'aurait pas pu montrer une telle intimité".
En 1907, affaiblie par la naissance de sa fille Mathilde, elle doit rester alitée. Quand elle a la permission de se lever, elle est victime d’une embolie pulmonaire et meurt le 21 novembre à Worpswede. Son dernier mot aura été "Schade Dommage". Elle n'avait pas 32 ans. Une grande amitié l'avait liée à Rainer Maria Rilke avec qui elle a longuement correspondu.
L'écrivain autrichien écrira "Requiem pour une amie" en 1908 après le décès de Paula. On en retiendra quelques lignes qui rappelleront certaines des natures mortes exposées "Et des fruits, j’achèterai des fruits, où l’on retrouve la campagne, jusqu’au ciel. Car à ceci tu t’entendais: les fruits dans leur plénitude". Si en France elle était jusqu'à maintenant peu connue, l'Allemagne a très vite détecté son talent, et n'hésitera à la surnommer "la Camille Claudel d'outre-Rhin" ou "le Picasso allemand". Et dès 1927, un musée Paula Modersohn-Becker a ouvert à Brême, le premier d'ailleurs consacré à une artiste peintre. Elle n'avait cependant exposé que cinq fois, et jamais individuellement, et n’avait vendu que trois toiles, et encore à des amis désireux de l’aider.
A la fin de l'exposition, une vidéo très bien faite d’une vingtaine de minutes évoque les grandes étapes de la vie de l'artiste, émaillée d"extraits de lettres et de réflexions personnelles. L'écrivain Marie Darrieussecq a beaucoup œuvré pour que l'exposition ait lieu, elle en est d'ailleurs la conseillère. Elle y a contribué par un livre dépeignant le destin tragique de Paula Modersohn-Becker. "Être ici est une splendeur", paru aux éditions P.O.L. Elle explique "C’est la première femme qui s’est peinte nue. C’est un grand moment de l’histoire de l’art: après de siècles de regard masculin sur le corps des femmes, cette femme, notamment parce que les modèles coûtaient cher, se peint elle: ses seins, ses hanches, son ventre, son nombril. Du coup, ça n’est ni une maman, ni une putain. C’est une femme. Et c’est incroyablement neuf".
Sa courte carrière, moins de quinze ans, comporte quand même quelque 750 toiles et plus de mille dessins qui font d'elle une figure importante de l’art moderne. C'est ce que pourra découvrir le visiteur grâce à la centaine de peintures et dessins exposés, portraits de mères et d’enfants, jeunes filles, garçonnets avec des chats dans leurs bras, paysages et natures mortes.
Née le 8 février 1876 à Dresde, formée à Berlin, Paula Becker qui épousera en 1901 le peintre Otto Modersohn. On ne pourra pas dire qu'il l'avait comprise puisqu'il n'hésita pas à déclarer "Elle tombe dans le travers de tout rendre grossier, laid, bizarre, comme en bois". Elle rejoint Worpswede, actuellement en Basse-Saxe, sorte de Barbizon allemand, à une vingtaine de km de Brême. Depuis 1889, quelques peintres et écrivains y avaient établi une communauté artistique désireuse de s'éloigner de la peinture académique, en s'inspirant de l’École française impressionniste. Elle en part rapidement pour se rendre à plusieurs reprises à Paris où elle découvre Auguste Rodin, Cézanne, Paul Gauguin, le Douanier Rousseau, Pablo Picasso, Henri Matisse, Maurice Denis ou Édouard Vuillard.
Elle fréquentera assidûment les salles du Louvre et c'est là qu'elle découvrira les peintures funéraires égyptiennes du Fayoum qui influencèrent tant ses portraits postérieurs. Il faut croire que la technique de l'artiste avait dû sembler audacieuse car plusieurs de ses toiles furent présentées lors de l’exposition sur l'Art dégénéré organisée à Munich, de juin à novembre 1937. Et Julia Garimorth de préciser "Elle a cassé les tabous avec ses représentations de mère à l'enfant aux antipodes des tableaux religieux de Madones. Comme elle était inconnue, elle expérimentait sans arrêt, sans crainte. Peut-être qu'un homme n'aurait pas pu montrer une telle intimité".
En 1907, affaiblie par la naissance de sa fille Mathilde, elle doit rester alitée. Quand elle a la permission de se lever, elle est victime d’une embolie pulmonaire et meurt le 21 novembre à Worpswede. Son dernier mot aura été "Schade Dommage". Elle n'avait pas 32 ans. Une grande amitié l'avait liée à Rainer Maria Rilke avec qui elle a longuement correspondu.
L'écrivain autrichien écrira "Requiem pour une amie" en 1908 après le décès de Paula. On en retiendra quelques lignes qui rappelleront certaines des natures mortes exposées "Et des fruits, j’achèterai des fruits, où l’on retrouve la campagne, jusqu’au ciel. Car à ceci tu t’entendais: les fruits dans leur plénitude". Si en France elle était jusqu'à maintenant peu connue, l'Allemagne a très vite détecté son talent, et n'hésitera à la surnommer "la Camille Claudel d'outre-Rhin" ou "le Picasso allemand". Et dès 1927, un musée Paula Modersohn-Becker a ouvert à Brême, le premier d'ailleurs consacré à une artiste peintre. Elle n'avait cependant exposé que cinq fois, et jamais individuellement, et n’avait vendu que trois toiles, et encore à des amis désireux de l’aider.
A la fin de l'exposition, une vidéo très bien faite d’une vingtaine de minutes évoque les grandes étapes de la vie de l'artiste, émaillée d"extraits de lettres et de réflexions personnelles. L'écrivain Marie Darrieussecq a beaucoup œuvré pour que l'exposition ait lieu, elle en est d'ailleurs la conseillère. Elle y a contribué par un livre dépeignant le destin tragique de Paula Modersohn-Becker. "Être ici est une splendeur", paru aux éditions P.O.L. Elle explique "C’est la première femme qui s’est peinte nue. C’est un grand moment de l’histoire de l’art: après de siècles de regard masculin sur le corps des femmes, cette femme, notamment parce que les modèles coûtaient cher, se peint elle: ses seins, ses hanches, son ventre, son nombril. Du coup, ça n’est ni une maman, ni une putain. C’est une femme. Et c’est incroyablement neuf".
Un Fauve sur les quais de Seine
Jusqu'au 21 août 2016, le même MAMVP consacre une importante exposition, plus d’une centaine d’œuvres, à Albert Marquet, peintre quelque peu oublié semble-t-il, de nos jours. Cette rétrospective permettra sans aucun doute de remettre à sa juste place cet artiste discret, grand voyageur qui a fixé sur la toile à grands traits caractéristiques des vues inoubliables et empreintes d'une certaine nostalgie. Justifiant ainsi le titre de l'exposition "Albert Marquet, peintre du temps suspendu".
Fabrice Hergott, directeur de l'institution indique: "Albert Marquet est un peintre un peu oublié du XXe siècle, grand ami de Matisse, un peintre dont on a une image un peu superficielle et assez bourgeoise". Pour sa part, Sophie Krebs, conservatrice en chef du Musée et commissaire de l'exposition précise que cette rétrospective tend à "rappeler que sa peinture est extrêmement poétique, profonde, beaucoup plus construite et déconstruite qu'il n'y paraît. Qu'elle mérite aujourd'hui d'être vue avec un regard neuf, un regard enrichi de toute l'histoire de l'art du XXe siècle et du début du XXIe".
Albert Marquet est né à Bordeaux le 27 mai 1875. A Paris, dans l'atelier de Gustave Moreau, il rencontre Matisse en 1892 et plus tard Derain à l'Académie Julian. En 1905, il expose salle VII, la salle "fauve", du Salon d'automne, mais il s'éloigne rapidement des couleurs que le groupe privilégiait pour rechercher des tonalités plus nuancées, plus douces.
A travers cette exposition, ordonnée autour de thèmes et chronologiquement, on se rend compte très vite combien Marquet est obsédé par l'eau, toujours présente dans ses tableaux, sous toutes ses formes, mer, fleuve, lac. Avec une prédilection pour la Seine dont il peint des séries, du Pont-Neuf à Notre-Dame en passant par le pont Saint-Michel. Il habitera plusieurs appartements sur les quais, Grands-Augustins et Saint-Michel. De là, il peint toujours les mêmes endroits, sous différents angles, à des moments différents, sous la neige ou lors de l'inondation de 1910. Mais il aime aussi peindre les ports, Le Havre, Marseille, Hambourg, Naples et aussi beaucoup Alger où il séjournera à maintes reprises, il s'y réfugie notamment en 1940. Il ne faut surtout pas y chercher d'exotisme. Il s'en explique lui-même dans une lettre à Matisse "Je ne serai jamais orientaliste". Seuls la mer, les ports, les bateaux semblent avoir ses faveurs. Il voyage énormément, en Normandie, dans le sud de la France, en Espagne, au Maroc et va même à Dakar, en 1907. Il meurt à Paris le14 juin 1947.
Cet homme si discret fut par ailleurs un homme engagé qui n'hésita pas à faire connaître ses opinions. En 1940, il signe une pétition d'artistes et d'intellectuels contre le nazisme. Il refuse d'être exposé au Salon des Tuileries pour ne pas avoir à fournir un certificat de "non-appartenance à la race juive". Il n'acceptera pas non plus que des collectionneurs prêtent ses œuvres pour cette manifestation. Après la guerre, il refusera la Légion d'honneur ainsi que son inscription à l'Académie des Beaux-Arts. Et il prendra à cette époque sa carte au Parti communiste français.
L'exposition sera ensuite présentée au musée Pouchkine de Moscou d’octobre 2016 à janvier 2017.
Fabrice Hergott, directeur de l'institution indique: "Albert Marquet est un peintre un peu oublié du XXe siècle, grand ami de Matisse, un peintre dont on a une image un peu superficielle et assez bourgeoise". Pour sa part, Sophie Krebs, conservatrice en chef du Musée et commissaire de l'exposition précise que cette rétrospective tend à "rappeler que sa peinture est extrêmement poétique, profonde, beaucoup plus construite et déconstruite qu'il n'y paraît. Qu'elle mérite aujourd'hui d'être vue avec un regard neuf, un regard enrichi de toute l'histoire de l'art du XXe siècle et du début du XXIe".
Albert Marquet est né à Bordeaux le 27 mai 1875. A Paris, dans l'atelier de Gustave Moreau, il rencontre Matisse en 1892 et plus tard Derain à l'Académie Julian. En 1905, il expose salle VII, la salle "fauve", du Salon d'automne, mais il s'éloigne rapidement des couleurs que le groupe privilégiait pour rechercher des tonalités plus nuancées, plus douces.
A travers cette exposition, ordonnée autour de thèmes et chronologiquement, on se rend compte très vite combien Marquet est obsédé par l'eau, toujours présente dans ses tableaux, sous toutes ses formes, mer, fleuve, lac. Avec une prédilection pour la Seine dont il peint des séries, du Pont-Neuf à Notre-Dame en passant par le pont Saint-Michel. Il habitera plusieurs appartements sur les quais, Grands-Augustins et Saint-Michel. De là, il peint toujours les mêmes endroits, sous différents angles, à des moments différents, sous la neige ou lors de l'inondation de 1910. Mais il aime aussi peindre les ports, Le Havre, Marseille, Hambourg, Naples et aussi beaucoup Alger où il séjournera à maintes reprises, il s'y réfugie notamment en 1940. Il ne faut surtout pas y chercher d'exotisme. Il s'en explique lui-même dans une lettre à Matisse "Je ne serai jamais orientaliste". Seuls la mer, les ports, les bateaux semblent avoir ses faveurs. Il voyage énormément, en Normandie, dans le sud de la France, en Espagne, au Maroc et va même à Dakar, en 1907. Il meurt à Paris le14 juin 1947.
Cet homme si discret fut par ailleurs un homme engagé qui n'hésita pas à faire connaître ses opinions. En 1940, il signe une pétition d'artistes et d'intellectuels contre le nazisme. Il refuse d'être exposé au Salon des Tuileries pour ne pas avoir à fournir un certificat de "non-appartenance à la race juive". Il n'acceptera pas non plus que des collectionneurs prêtent ses œuvres pour cette manifestation. Après la guerre, il refusera la Légion d'honneur ainsi que son inscription à l'Académie des Beaux-Arts. Et il prendra à cette époque sa carte au Parti communiste français.
L'exposition sera ensuite présentée au musée Pouchkine de Moscou d’octobre 2016 à janvier 2017.
La Hongrie à Avignon
Le 15 et 17 ma 2016, l'Opéra Grand Avignon proposait en création mondiale "Senza sangle" (sans sang), du Hongrois Péter Eötvös, dans une mise en scène de Róbert Alföldi. Sous la direction du compositeur à la tête de l'Orchestre régional Avignon-Provence.
Pour son dernier opéra, le dixième, Péter Eötvös s'est inspiré d’un court roman homonyme de l’écrivain italien Alessandro Baricco, paru en 2002 et Mari Mezei, son épouse en a tiré un livret. Au cours de sa carrière, Eötvös a trouvé ses sujets aussi bien dans la littérature contemporaine, "Le balcon" d'après Jean Genet, que dans le grand répertoire international avec "Les Trois Sœurs" de Tchékhov ou dans des textes plus anciens tel "Lady Sarashina", du Japon médiéval. "Senza sangue" a été conçu comme le pendant d'une autre œuvre qui sera donnée dans le même programme "Le Château de Barbe-Bleue"" de Béla Bartók, mise en scène de Nadine Duffaut.
Avant cette version scénique, "Senza sangle", avait été créé en version de concert lors d’une tournée, à Cologne, le 1er et 8 et 9 mai 2015 à l'Avery Fisher Hall de New York. La mezzo-soprano Anne Sofie von Otter tenait alors le rôle de l'héroïne. C'est d'ailleurs à la demande du New York Philharmonic et de la Philharmonie de Cologne, que Péter Eötvös avait composé cette œuvre en un acte, pour deux chanteurs, pensée comme un pendant pour Le Château de Barbe-Bleue de Bartók. œuvre que Péter Eötvös tient pour celle représentant le mieux la relation homme-femme présente dans tout opéra qui se respecte: "L’amour n’est pas un but, mais un moyen par lequel on peut atteindre ce but qu’est la rédemption, la compréhension du destin et son dépassement". Dans "Senza sangue", un lourd passé lie les deux protagonistes, l’un a tué toute la famille de l’autre, ils se rapprochent et s’unissent même alors que tout devrait les séparer.
On pourra peut-être se demander pourquoi Peter Eötvös habitué d'établissements prestigieux vient-il créer une de ses œuvres dans un Opéra, excellent certes, mais beaucoup moins connu internationalement que ceux où il est accueilli généralement. Il faut évoquer le concours "Armel Opéra" organisé depuis plusieurs années en Hongrie. International, il est ouvert aux maisons d’opéra et vise à récompenser la meilleure des productions et à attirer l'attention sur les jeunes talents qui se sont affrontés. Et l'Opéra Grand Avignon est partenaire de l'entreprise. L'an dernier par exemple y fut donné le 3 juin, "Le braci" de Marco Tutino, d'après "Les braises" le célèbre roman de Sándor Márai. Le 27 juin 2016, "Senza Sangue" et "Le château de Barbe-Bleue"seront donnés au Nemzeti Színház de Budapest dans le cadre du concours "Armel Opera". Quant à Romain Bockler, le protagoniste masculin de "Senza sangle", il a été lauréat de ce concours en juin 2015.
Pour son dernier opéra, le dixième, Péter Eötvös s'est inspiré d’un court roman homonyme de l’écrivain italien Alessandro Baricco, paru en 2002 et Mari Mezei, son épouse en a tiré un livret. Au cours de sa carrière, Eötvös a trouvé ses sujets aussi bien dans la littérature contemporaine, "Le balcon" d'après Jean Genet, que dans le grand répertoire international avec "Les Trois Sœurs" de Tchékhov ou dans des textes plus anciens tel "Lady Sarashina", du Japon médiéval. "Senza sangue" a été conçu comme le pendant d'une autre œuvre qui sera donnée dans le même programme "Le Château de Barbe-Bleue"" de Béla Bartók, mise en scène de Nadine Duffaut.
Avant cette version scénique, "Senza sangle", avait été créé en version de concert lors d’une tournée, à Cologne, le 1er et 8 et 9 mai 2015 à l'Avery Fisher Hall de New York. La mezzo-soprano Anne Sofie von Otter tenait alors le rôle de l'héroïne. C'est d'ailleurs à la demande du New York Philharmonic et de la Philharmonie de Cologne, que Péter Eötvös avait composé cette œuvre en un acte, pour deux chanteurs, pensée comme un pendant pour Le Château de Barbe-Bleue de Bartók. œuvre que Péter Eötvös tient pour celle représentant le mieux la relation homme-femme présente dans tout opéra qui se respecte: "L’amour n’est pas un but, mais un moyen par lequel on peut atteindre ce but qu’est la rédemption, la compréhension du destin et son dépassement". Dans "Senza sangue", un lourd passé lie les deux protagonistes, l’un a tué toute la famille de l’autre, ils se rapprochent et s’unissent même alors que tout devrait les séparer.
On pourra peut-être se demander pourquoi Peter Eötvös habitué d'établissements prestigieux vient-il créer une de ses œuvres dans un Opéra, excellent certes, mais beaucoup moins connu internationalement que ceux où il est accueilli généralement. Il faut évoquer le concours "Armel Opéra" organisé depuis plusieurs années en Hongrie. International, il est ouvert aux maisons d’opéra et vise à récompenser la meilleure des productions et à attirer l'attention sur les jeunes talents qui se sont affrontés. Et l'Opéra Grand Avignon est partenaire de l'entreprise. L'an dernier par exemple y fut donné le 3 juin, "Le braci" de Marco Tutino, d'après "Les braises" le célèbre roman de Sándor Márai. Le 27 juin 2016, "Senza Sangue" et "Le château de Barbe-Bleue"seront donnés au Nemzeti Színház de Budapest dans le cadre du concours "Armel Opera". Quant à Romain Bockler, le protagoniste masculin de "Senza sangle", il a été lauréat de ce concours en juin 2015.