Internet bouleverse tous les médias

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Par Canal Académie - Myriam Lemaire Rédigé le 12/01/2010 (dernière modification le 12/01/2010)

A quelles règles les médias, anciens ou nouveaux, obéissent-ils ? Quelle influence exercent-ils sur chacun de nous et sur les diverses collectivités ? Peuvent-ils enfin contribuer à civiliser le village planétaire ? A ces interrogations et à beaucoup d’autres, la 14e édition de Médias & Sociétés apporte des réponses. Son auteur, Francis Balle, professeur à l’Université Paris 2, ancien membre du CSA, spécialiste des médias, reçu par Myriam Lemaire, présente cette « Bible des Médias ». Il évoque notamment les bouleversements du paysage des médias engendrés par la révolution numérique.
Interview de Francis Balle, auteur de Médias & Sociétés.
Internet, un média qui récapitule tous les autres
Des défis nouveaux pour la presse
Les mutations de la télévision
Une chance pour la télévision publique
Le village planétaire et la diversité culturelle
Qu’apportera Internet au XXIe siècle


Médias et sociétés, 14e édition

Edition, Presse, Cinéma, Radio, Télévision et Internet, Médias & Sociétés traite de tous les médias, de façon pluridisciplinaire. Son fil conducteur n’a pas changé depuis 1980, date de la première édition. Refondue et enrichie, la 14e édition comporte trois grandes parties :

1. De la presse à Internet propose un panorama historique et sociologique, des médias depuis Gutenberg jusqu’à aujourd’hui.

2. Le régime des médias analyse les règles de droit auxquelles les médias sont soumis et dresse une typologie par pays.

3. Les médias, l’individu et la société ouvre des champs de réflexion sur l’influence des médias sur les sociétés et les gens et sur ce que font les sociétés avec les médias.

Cet ouvrage comporte aussi 200 tableaux, schémas ou graphiques et une table de 500 auteurs, acteurs et inventeurs.

Internet, un média qui récapitule tous les autres

"En 2007-2008, on croyait encore qu’Internet était un média de plus. Depuis quelques mois, on a réalisé qu’Internet n’est pas seulement un média mais un outil qui redistribue les cartes et qui fait à lui seul ce que les autres médias font séparément. Il récapitule 150 ans d’histoire des médias", explique Francis Balle. "C’est un bouleversement considérable."

Des défis nouveaux pour la presse

Quel est l’avenir de la presse écrite ? Francis Balle observe qu’elle est très diverse. Il faut distinguer notamment les grands quotidiens généralistes et la presse spécialisée consacrée à un sujet ou à une audience spécifiques. Ce sont les grands quotidiens d’information générale qui sont les plus menacés, à la fois par la concurrence des journaux gratuits, par celle des sites d’information sur Internet et par la presse spécialisée. En France, les Etats Généraux de la presse, ouverts en 2008, ont permis à la presse de faire le point et l’ont invitée à réfléchir sur ce qu’elle doit faire face au défi du numérique. Mais pour Francis Balle les mesures et les aides adoptées en 2009 ne suffiront pas seules à remédier aux difficultés qu’elle traverse.

Francis Balle pronostique la disparition d’au moins un grand quotidien généraliste dans les cinq ans à venir en France. Les autres ne survivront que s’ils jouent la carte de la qualité et de la différence. Il souligne que les règles d’or du journalisme fondé au milieu du XIXème siècle, l’impartialité, la neutralité, l’objectivité demeurent valables aujourd’hui. Le journaliste a un devoir de vérité mais aussi un droit à l’erreur.

Les mutations de la télévision

Grâce à la révolution numérique l’on peut regarder la télévision sur différents écrans, celui du téléviseur mais aussi celui de l’ordinateur et du téléphone portable ou de la console de jeux. La télévision « délinéarisée » va occuper une place de plus en plus importante, estime Francis Balle. « Jusqu’à présent la télévision donnait rendez-vous au téléspectateur. Désormais c’est lui qui donne rendez-vous à la télévision ». La télévision de rattrapage (catch-up TV) qui permet de voir ou revoir un programme déjà diffusé, va se développer mais la télévision conventionnelle ne va pas disparaître, estime Francis Balle, car il ne faut pas sous-estimer la paresse du téléspectateur qui a tendance à regarder ce qu’on lui offre, ni son envie de divertissement.

Une chance pour la télévision publique

Interrogé sur les conséquences de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques, Francis Balle rappelle le virage amorcé par France Télévisions depuis la nomination de Patrick de Carolis et de Patrice Duhamel. La suppression de la publicité, dont il n’osait même plus rêver, a été une décision très courageuse du Chef de l’Etat. Elle a permis aux chaînes publiques de devenir ce qu’elles devaient être et a rééquilibré le paysage audiovisuel. Francis Balle rappelle le précepte de Jean Cluzel, ancien Sénateur et Président fondateur de Canal Académie : « Argent public, chaînes publiques ». Il évoque aussi l’exemple de la chaîne américaine PBS, « la seule véritable chaîne publique au monde » qui est financée par le mécénat et par une dotation votée par le Congrès et pas par la publicité. Elle excelle dans les émissions pour la jeunesse et les émissions d’information générale.

Le village planétaire et la diversité culturelle


Alors qu’à l’époque de Mac Luhan, on croyait que les médias allaient dans le sens de l’uniformisation des cultures, on constate que les médias se diversifiant et étant moins onéreux, chaque culture peut désormais s’exprimer. Les différentes cultures peuvent cohabiter sur la Toile, constate Francis Balle. « Chaque peuple prend de plus en plus conscience de sa diversité, chaque société est de plus en plus diverse. Les médias font le grand écart entre l’infiniment grand et l’infiniment petit de telle sorte que ce qui est de plus en plus visible, c’est à la fois la diversité du monde et des cultures et la diversité de valeurs universelles. On découvre à travers la diversité l’unité du genre humain ». C’est un constat paradoxal, souligne Francis Balle.

Qu’apportera Internet au XXIe siècle ?

« L’avenir n’est écrit nulle part. Mais si l’on veut tenter une prévision il ne faut pas écouter les ingénieurs qui se sont toujours trompés sur les usages des technologies, il faut écouter les besoins de la société ». Au 21ème siècle ce dont nous avons le plus besoin, estime Francis Balle, concerne les secteurs de l’éducation et de la santé. « La formation pour tous, c’est vraiment l’enjeu du 21ème siècle », dit Francis Balle qui croit beaucoup à l’avenir du e-learning, la formation à distance.

Francis Balle est professeur de science politique à l’Université Paris II Panthéon-Assas où il a fondé le Master recherche sur les médias et le Master professionnel Multimédias. Il dirige l’IREC (Institut de Recherche et d’Études sur la Communication). Il est professeur invité, depuis 1981, à l’Université de Stanford (Californie).
Professeur de philosophie au lycée français d’Oran (1963 1965), assistant à la faculté d’Alger (1965 1967), puis maître assistant à la Sorbonne (1967 1972). Il dirige l’Institut français de presse (IFP) de 1976 à 1986. Vice Chancelier des Universités de Paris de 1986 à 1989, il est nommé en janvier 1989 membre du CSA Conseil supérieur de l’audiovisuel au sein duquel jusqu’à la fin de son mandat, il est en charge du spectre hertzien, des nouvelles normes et des nouvelles technologies.








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