Hezbollah-Tribunal Hariri : compte à rebours d’une confrontation interne au Liban ?


Par Jean-Luc Vannier Rédigé le 31/10/2010 (dernière modification le 07/11/2010)

Le pays du Cèdre est à nouveau sous tension : malgré les médiations saoudienne et syrienne, le Hezbollah s’oppose désormais frontalement aux autorités politiques du pays afin de bloquer les travaux du Tribunal Spécial pour le Liban, susceptibles d’incriminer certains de ses militants. Après un appel solennel lancé à « tous les Libanais à boycotter » le TSL, un Député du Parti de Dieu propose une « protection de la milice chiite » à tous ceux qui décideront de se soustraire à l’instance judiciaire internationale.


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Dans ses tentatives répétées d’empêcher sa probable incrimination par le Tribunal Spécial pour le Liban (TSL), le Hezbollah vient de franchir plusieurs pas significatifs : alors qu’ils consultaient, avec l’accord des autorités libanaises, les fichiers d’une clinique gynécologique à Ouzai, fief du Hezbollah situé dans la banlieue sud de Beyrouth, deux enquêteurs du bureau du Procureur du TSL ont été violemment pris à partie par des militantes, amenées en renfort par un convoi sous bonne escorte du Parti de Dieu. Le lendemain, dans une conférence de presse improvisée et sous couvert d’une « atteinte à la dignité des femmes musulmanes », le Secrétaire général du Hezbollah Hassan Nasrallah appelait tous les Libanais, sous peine d’apparaître comme des éléments « hostiles à la résistance », à boycotter le TSL. Ce dimanche enfin, Ali Ammar, un Député du parti pro-iranien a proposé une « protection de la milice chiite à celles des autorités libanaises qui refuseraient de coopérer » avec l’instance judiciaire internationale.

Constatant sans doute son échec à ralentir, par différentes manœuvres médiatiques visant à retourner l’opinion publique en sa faveur, les travaux du Tribunal, le Parti de Dieu adopte désormais une attitude plus offensive en s’opposant frontalement aux autorités libanaises qui, du Président de la République Michel Sleiman au premier Ministre Saad Hariri, soutiennent la procédure engagée par les Nations Unies.

Coup de force suicidaire

Malgré la puissance de son armement -les expert estiment à plus de 40 000 le nombre de roquettes susceptibles d’atteindre Israël- il appert que le Hezbollah privilégie encore -mais pour combien de temps ?- une stratégie savamment graduée de la tension : craindrait-il, à l’image de la guerre contre Tsahal en juillet 2006, de l’occupation armée du centre-ville de Beyrouth en décembre 2006 et du blocage de l’aéroport international de la capitale en mai 2008, de réitérer un nouveau coup de force en vue de détourner l’attention portée à la publication prochaine de l’acte d’accusation du TSL ?

Nul doute que le Hezbollah pèse le côté suicidaire de cet « ultima ratio »: loin de lui permettre, comme l’assure sa propagande, de reconquérir Jérusalem, une guerre civile libanaise ou un conflit avec l'Etat hébreu déclenchée par le Parti de Dieu achèverait de révéler, pour ceux qui y croiraient encore, la nature iranienne de son agenda caché et bannirait à jamais son auréole de « résistance » acquise après le retrait en 2000 de Tsahal du sud-Liban et sa « victoire » dans la guerre de juillet 2006 contre Israël. « L’état hébreu ne peut, par définition, être défait », avouait cet été à l’auteur de ces lignes, un proche du premier Ministre libanais : « sous peine de laisser anéantir son propre système, la communauté internationale ne permettra pas à une milice armée, le fut-elle puissamment par un pays tiers, de détruire un autre Etat ».

Lettre du Congrès au Président Obama

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Déjà très aléatoire, compte tenu de l’obsession syrienne à reprendre le contrôle du pays du cèdre et du jeu ambivalent de Damas entre Téhéran, Riyadh et Washington, l’entente saoudo-syrienne s’efforce maintenant d’inclure l’Iran dans un triumvirat extérieur destiné à calmer les tensions intra-libanaises. Il est douteux qu’elle y parvienne.

Reste que la communauté occidentale et les Etats-Unis sont fermement décidés à empêcher simultanément une nouvelle tutelle syrienne sur le Liban et l’utilisation du territoire libanais comme tête de pont d’une offensive iranienne contre l’Etat hébreu. C’est d’ailleurs en ce sens que deux Représentants du Congrès américain, le Démocrate Gary Ackerman et le Républicain Dan Burton viennent d’écrire au président Barack Obama. Dans une lettre du 18 octobre dernier, ils s’inquiètent de « l’influence croissante de la Syrie et du Hezbollah au Liban » et reprochent au Président de « ne pas accorder davantage de soutien aux mouvements politiques démocratiques libanais qui tentent de s’y opposer ». « Malgré leur victoire aux élections législatives » de mai 2009, insistent les « Congressmen », la coalition gouvernementale du 14 mars emmenée par Saad Hariri « subit les pressions constantes » pour retirer à l’ONU son soutien aux investigations du Tribunal Spécial pour le Liban. Des investigations, soulignent-ils encore, qui devraient « probablement prouver ce que chacun pressentait » : la « culpabilité du Hezbollah dans l’assassinat de l’ancien premier Ministre Rafic Hariri ». De quoi éclairer le brusque changement de ton de Washington envers les différents alliés régionaux du Parti de Dieu.





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