Du chagrin renaît l'espoir


Par Rédigé le 16/05/2020 (dernière modification le 16/05/2020)

Après le déconfinement en Arménie, Jonathan Lacôte ambassadeur de France à Erévan et Alex Bortolan, conseiller de Coopération et d'action culturelle se sont rendus à Gumri, ville culturelle du pays qui a cruellement souffert du tremblement de terre de 1988. Ils ont élevé Martin Pashayan au grade d’Officier dans l’Ordre des Palmes académiques pour le service qu’il a rendu à la culture française.


Les larmes séchées, non oubliées

Martin Pashayan (c) Hasmik Arakelyan
Dès l’entrée, dans la salle à manger de l'appartement de Martin Pashayan, un grand portrait de Charles Aznavour sourit aux invités, puis on aperçoit une vue de la Tour Eiffel en puzzle soigneusement encadrée. On aperçoit aussi un  petit buste de Napoléon Bonaparte posé sur un meuble. Martin Pashayan, entouré  des enfants de son second mariage  avoue: ‘‘Le français c’est tout un art de vivre’’. Cet éminent professeur de français de 74 ans est amoureux de la langue de Molière et de la culture française depuis les bancs de l’école. Il  n’aurait jamais imaginé que le 7 décembre 1988n sa vie serait  bouleversée et que son métier serait sa seule consolation. La langue française a sauvé sa vie au sens propre du mot. Le français et l’enseignement lui ont donné  la force de continuer à vivre au moment où les gens désespèrent. Le séisme de 1988 a pris la vie de sa femme et de ses 2 enfants. Sous les ruines, il a trouvé ses 299 écoliers, 299 vies brisées. ‘‘Douleur sans remède’’, avoue-t-il. Déchiré et privé de tout espoir, durant 39 jours, le vice-directeur de l’école numéro 10 de Gumri a pu renaître grâce à sa volonté ferme de reconstruire l’école détruite. Le quarantième jour après la tragédie, il en a fait le serment. Cette idée l’a aidé à avancer en serrant les poings et en séchant ses larmes  dont on perçoit encore les traces plusieurs décennies après la catastrophe.

Le français, l'enseignement et la foi

Martin Pashayan a réuni toutes ses forces pour atteindre son objectif. Il a frappé à plusieurs portes et a trouvé des partenaires français qui l’ont aidé à rebâtir l’école numéro 10 au même endroit. Le 8 juillet 1994, la première pierre était posée par l’ancien ministre français de la Culture et de la Francophonie Jacques Toubon. En 1999, l’école a rouvert ses portes devant 1.700 élèves et elle est devenue un des foyers de la francophonie en Arménie. Jusqu’en 2009 Martin Pashayan a été son directeur et en même temps, il a créé également une communauté francophone à Gumri,  collaborant avec les élus de Marseille, de Grenoble et d’Issy-les-Moulineaux, ainsi qu’avec différentes organisations francophones implantées en Arménie comme KASA, SPFA, UGAB entre autres. L’ambassadeur de France souligne trois éléments qui ont marqué la vie de professeur, le français, l’enseignement et l’espoir. C’était leur première rencontre même  si l’autobiographie ‘‘Le serment du quarantième jour’’ rédigée par Pascal Maguesyan, lui en ait beaucoup appris sur ce professeur de français qui avait retrouvé l’espoir à partir du chagrin: ‘‘L’espoir que vous avez démontré, l’action que vous avez entreprise participent vraiment à la renaissance de Gumri. Aujourd’hui nous souhaitons que l’espoir que vous avez porté pendant ces longues années, profite à l’ensemble de la ville de Gumri et nous profite également, car votre action et votre détermination nous donnent de l’énergie pour continuer à vous apporter la langue française et plus généralement à soutenir l’Arménie dans son développement. Nous sommes ici pour reconnaître vos mérites, mais nous sommes aussi ici pour partager votre espoir au sujet de l’avenir de l’Arménie’’..
Cette distinction donne collectivement de l’énergie pour porter la flamme du français et des relations entre les deux pays,- a continué Jonathan Lacôte: ‘‘Le choc du séisme est arrivé jusqu’en France, pour beaucoup de Français dont je fais partie, cela été la première prise de conscience de l’existence de l’Arménie même avant l'indépendance et l'établissement de relations diplomatiques. 1988 marque un point de départ des relations franco-arméniennes et ce mouvement de solidarité se prolonge jusqu'à aujourd'hui’’.
Le professeur avec plus de 40 ans d’expérience, parle de la formule de sa réussite: ‘‘Un écolier c’est comme des matières premières, vous devez les cultiver et obtenir de bons résultats. Pour un professeur, la véritable récompense c’est l’amour de ses élèves’..
Il y a déjà 10 ans que le directeur de l’école numéro 10 est en retraite, mais il s’empresse de dire et ses yeux brillent, que ses anciens élèves l’appellent toujours et gardent aussi le contact à travers les réseaux sociaux.
 

L'Ambassadeur de France en Arménie Jonathan Lacôte et le Conseiller de coopération et d'action culturelle Alex Bortolan (c) Hasmik Arakelyan

Martin Pashayan et l'Ambassadeur de France en Arménie Jonathan Lacôte (c) Hasmik Arakelyan

Dans l'appartement de Martin Pashayan (c) Hasmik Arakelyan

Le portrait de Charles Aznavour dans l'appartement de Martin Pashayan (c) Hasmik Arakelyan

(c) Hasmik Arakelyan

Martin Pashayan et ses élèves (c) archive personnelle de Martin Pashayan

Au centre François Rochbloin et Martin Pashayan (c) l'archive personnel de Martin Pashayan






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