Le chemin d’Istanbul
Alors on voulût prendre le bateau pour rejoindre Istanbul depuis Izmir. Mais après recherches et informations contradictoires, il s’est avéré que ces ferries ne circulent plus ou – au choix – pas encore. On voulût alors emprunter la liaison combinée train bateau dont on entendit parler lorsqu’on tentait de se renseigner sur les ferries. Mais tout le monde tentât alors de nous en dissuader arguant de la lenteur du trajet et des complications pour se rendre à la gare d’Izmir. Et faute d’informations précises sur les horaires, on se résolût à prendre… le bus, pour ne pas changer ! C’est donc une journée entière que l’on a encore passée sur la route, occupée à épuiser notre réserve d’énigmes respectives et à faire la conversation à Kadriye, une jeune turque de 17 ans qui parle un anglais très hésitant (mais c’est la seule à dix rangées à la ronde) et qui m’apprend quelques mots de turc. Et soudain surprise, à la nuit tombée le bus s’arrête devant un gros bateau la gueule béante au bord du quai qui embarque voitures, camions et bus. Et voilà que notre bus s’embarque à son tour et on se retrouve sur le pont avec le vent chargé d’embruns qui fouette le visage et au loin les lumières des banlieues d’Istanbul… Cette traversée d’une petite partie de la mer de Marmara se fait en moins d’une heure mais elle a quand même l’avantage de compenser notre frustration face à nos malheureuses tentatives de bateau.
Istanbul, encore un autre monde…
A l’arrivée, c’est la cohue, des embouteillages et des arrêts à différentes stations de bus et l’on est bien sûr censé savoir à laquelle descendre. Heureusement Kadriye est là pour nous aider et on descend dans un otogar complètement engorgé, manifestement trop étroit pour les manœuvres des bus au milieu des passagers qui attendent un peu partout dans l’agitation : pas de doute, nous sommes bien arrivées dans une grande métropole et au milieu du trafic qui va avec. On rejoint le centre-ville avec une navette de la compagnie de bus, jusqu’à la fameuse place Taksim. De là on descend une des artères les plus animées de la ville, la rue piétonne et commerçante « Istiklal ». C’est un nouveau choc : si je m’étais habituée à la Turquie, je n’étais pas encore préparée à Istanbul… Il est minuit passé mais la rue grouille de monde qui déambule, différents groupes de musique jouent à plein volume dans les rues pour ramasser quelques pièces, et pas une fille voilée à l’horizon ou presque. C’est au contraire rempli d’une jeunesse délurée, de tous les styles, du gothique au dread locks en passant par la robe de soirée… Enfin une ville du Moyen-Orient qui accepte l’excentricité, et sur laquelle semble souffler un vent de liberté ! Et l’on n’est pas au bout de nos surprises en arrivant à notre hôtel, il est tout aussi excentrique. C’est le premier hôtel bon marché où l’on a trouvé de la place parmi une liste d’autres qui avaient tous la même réponse : « full ». Il semble que l’odieux attentat terroriste qui a eu lieu quelques jours plus tôt dans un quartier populaire de la ville n’ait pas fait fuir les touristes. Le « chillout hostel » donc, est une sorte d’auberge de jeunesse complètement hippie dont la réception n’est autre que le comptoir du bar au rez-de-chaussée. La décoration consiste en un peinturlurage systématique de tous les murs en couleurs flashy. Ca sent le shit dans les étages et à l’intérieur de notre chambre au confort très sommaire, le volume sonore est tellement fort qu’on se croirait dans la boîte de nuit que l’hôtel doit avoir pour voisinage. Ce n’est pas grave, c’est juste pour une nuit, demain on investira le studio que Secil, amie d’un ami, a gentiment proposé de nous prêter à partir du jour suivant, elle-même étant absente de Turquie…
Panorama
La ballade du lendemain est plus apaisante, elle commence par une petite rue en pente bordée de kebabs et vendeurs de jus d’orange frais. Elle débouche sur un panorama de mosquées à coupoles, typiques du paysage turc, ainsi que sur le pont qui relie Taksim à Sultanahmet, le centre ancien où se concentrent la plupart des monuments historiques de la ville. Ce pont est le rendez-vous préféré des pêcheurs en goguettes, aujourd’hui dimanche ils sont tous à leurs postes, il n’y a plus un mètre de libre où poser sa cane à pêche sur toute la longueur du pont ! Les mouettes tournoient au dessus d’eux se laissant porter par la brise, il fait presque frais, la première fois depuis le début de notre voyage ! On se sent bien et aussi légères que le vent, prêtes à découvrir les beautés d’Istanbul…