Le compositeur Jean-Claude Petit tente un retour à l'opéra
Photo courtoisie (c) DR
Non, Prosper Mérimée n’est pas que l’auteur de "Carmen". Il y a aussi cette "Colomba", drame, âpre et rude, aux senteurs de garrigues et iode vengeresse. L’Ile de Beauté, son maquis et ses plages n’est ici qu’une carte postale pour touristes en mal de dépaysement.
Après Bizet et son succès gitano-espagnol interplanétaire, il était sans doute difficile de faire mieux et tirer un opéra de cette nouvelle corse, ciblée également côté folklore, mais toute aussi digne d’intérêt, relevait donc de la gageure. Les diverses tentatives entre 1883 et 1925 n’ayant pas laissé un souvenir indélébile…
Le Marseillais Benito Pellegrin a sournoisement bien fait de tirer cette histoire de vendetta familiale vers une sorte de tragédie grecque. Avec en arrière-plan une couleur historique évidente: la Restauration. Trahison alors du texte original? Que nenni! C’est oublier que Meilhac et Halévy en ont rajouté une couche aussi pour leur "Carmen".
Y voir plutôt un éclairage nouveau qui tient, ma foi, assez bien la route. A la simple histoire de vengeance, s’ajoute une lutte politique entre bonapartistes et royalistes. Orso, devenant ainsi, non plus le jouet machiavélique de sa sœur Colomba, mais une sorte de héros maudit, Hernani et Œdipe à la fois, marqué par le destin.
On sort à la fois décontenancé et ravi du spectacle marseillais. Allons-y franco! On ne fera sans doute pas mieux avec les costumes (Katia Duflot), décors (Emmanuelle Favre), vidéos et lumières voulus pour le spectacle signé par Charles Roubaud qui tient la route mieux qu’un autre et cerne au plus près cette histoire de vengeance ancestrale.
On regrettera cependant les nombreux précipités de rideaux qui ralentissent l’action, font faiblir l’intérêt et font tomber une mayonnaise que l’on était prêt à savourer avec toute la meilleure volonté du monde. Quelques interludes musicaux à la manière de Pélléas n’auraient-ils pas été plus judicieux?
Ce qui peut se concevoir sans peine au cinéma, le compositeur Jean-Claude Petit y a connu quelques triomphes mérités, ne passe pas toujours à l’opéra.
Ne cherchons pas non plus dans ces quatre actes les hardiesses innovatrices de ses illustres aînés. Rien de bien révolutionnaire dans cette musique qui se veut forcément abordable pour tous. Les parties chorales titillent la curiosité du simple mélomane, les airs et duos sont d’une réelle veine mélodique et se devine forcément derrière tout cela le compositeur de variété et de publicité.
Aucun reproche sérieux à faire au plateau réuni pour l’occasion. Tous s’engagent avec cœur et esprit dans l’entreprise périlleuse de la création lyrique. On y croit dur comme fer, on fonce, et dans le genre ça casse ou ça passe on relève le défi haut la main.
En diable d’homme sympathique, Jean-Philippe Lafont, imposant comme la Statue du Commandeur, arrive après une longue carrière exemplaire à tirer son épingle du jeu en Colonel Nevil un tantinet trop exubérant.
Simplement parfait le Préfet de Francis Dudziak, tout comme le Castriconi de Cyril Rovery, deux géants, deux barytons que l’on redécouvre de saisons en saisons avec un plaisir intense.
Pour sa première apparition sur la scène phocéenne, Jean-Noël Briend a fait forte impression. Son Orso, macho a souhait a séduit mon voisin de droite et ma voisine de gauche. Un ténor prometteur à entendre au plus vite dans le bel canto.
Fort bien en place le reste du plateau masculin. Au jeu des Sept Familles, les fils Barricini ne font qu’une bouché du Père.
Chez les Dames, Pauline Courtin, Cécile Galois et Lucie Roche, ne se contentent pas de faire de la figuration intelligente, elles chantent aussi, et plutôt bien que mal. Chœurs parfaits, mais nous y sommes habitués.
C’est bien sûr la forte personnalité de Marie-Ange Todorovitch (on dirait le rôle écrit pour elle quand on connaît l’artiste) qui emporte tout sur son passage. Visiblement à l’aise dans cette redoutable partition habilement aménagée à sa tessiture actuelle, sans jamais chercher à tirer à elle la couverture, elle vit sa vengeance dans une sorte d’assomption tragique et théâtrale qui fait froid dans le dos.
Tous étaient fort bien tenus, soutenus, aidés par Claire Gibault qui avait la lourde responsabilité de narrer, sur ses frêles épaules, cette mauvaise blague corse où ne manquait dans ces notes parfois sèches et dures qu’un rien de lyrisme échevelé, de grandeur épique ébouriffante, bref, le goût du vrai sang en quelque sorte.
Après Bizet et son succès gitano-espagnol interplanétaire, il était sans doute difficile de faire mieux et tirer un opéra de cette nouvelle corse, ciblée également côté folklore, mais toute aussi digne d’intérêt, relevait donc de la gageure. Les diverses tentatives entre 1883 et 1925 n’ayant pas laissé un souvenir indélébile…
Le Marseillais Benito Pellegrin a sournoisement bien fait de tirer cette histoire de vendetta familiale vers une sorte de tragédie grecque. Avec en arrière-plan une couleur historique évidente: la Restauration. Trahison alors du texte original? Que nenni! C’est oublier que Meilhac et Halévy en ont rajouté une couche aussi pour leur "Carmen".
Y voir plutôt un éclairage nouveau qui tient, ma foi, assez bien la route. A la simple histoire de vengeance, s’ajoute une lutte politique entre bonapartistes et royalistes. Orso, devenant ainsi, non plus le jouet machiavélique de sa sœur Colomba, mais une sorte de héros maudit, Hernani et Œdipe à la fois, marqué par le destin.
On sort à la fois décontenancé et ravi du spectacle marseillais. Allons-y franco! On ne fera sans doute pas mieux avec les costumes (Katia Duflot), décors (Emmanuelle Favre), vidéos et lumières voulus pour le spectacle signé par Charles Roubaud qui tient la route mieux qu’un autre et cerne au plus près cette histoire de vengeance ancestrale.
On regrettera cependant les nombreux précipités de rideaux qui ralentissent l’action, font faiblir l’intérêt et font tomber une mayonnaise que l’on était prêt à savourer avec toute la meilleure volonté du monde. Quelques interludes musicaux à la manière de Pélléas n’auraient-ils pas été plus judicieux?
Ce qui peut se concevoir sans peine au cinéma, le compositeur Jean-Claude Petit y a connu quelques triomphes mérités, ne passe pas toujours à l’opéra.
Ne cherchons pas non plus dans ces quatre actes les hardiesses innovatrices de ses illustres aînés. Rien de bien révolutionnaire dans cette musique qui se veut forcément abordable pour tous. Les parties chorales titillent la curiosité du simple mélomane, les airs et duos sont d’une réelle veine mélodique et se devine forcément derrière tout cela le compositeur de variété et de publicité.
Aucun reproche sérieux à faire au plateau réuni pour l’occasion. Tous s’engagent avec cœur et esprit dans l’entreprise périlleuse de la création lyrique. On y croit dur comme fer, on fonce, et dans le genre ça casse ou ça passe on relève le défi haut la main.
En diable d’homme sympathique, Jean-Philippe Lafont, imposant comme la Statue du Commandeur, arrive après une longue carrière exemplaire à tirer son épingle du jeu en Colonel Nevil un tantinet trop exubérant.
Simplement parfait le Préfet de Francis Dudziak, tout comme le Castriconi de Cyril Rovery, deux géants, deux barytons que l’on redécouvre de saisons en saisons avec un plaisir intense.
Pour sa première apparition sur la scène phocéenne, Jean-Noël Briend a fait forte impression. Son Orso, macho a souhait a séduit mon voisin de droite et ma voisine de gauche. Un ténor prometteur à entendre au plus vite dans le bel canto.
Fort bien en place le reste du plateau masculin. Au jeu des Sept Familles, les fils Barricini ne font qu’une bouché du Père.
Chez les Dames, Pauline Courtin, Cécile Galois et Lucie Roche, ne se contentent pas de faire de la figuration intelligente, elles chantent aussi, et plutôt bien que mal. Chœurs parfaits, mais nous y sommes habitués.
C’est bien sûr la forte personnalité de Marie-Ange Todorovitch (on dirait le rôle écrit pour elle quand on connaît l’artiste) qui emporte tout sur son passage. Visiblement à l’aise dans cette redoutable partition habilement aménagée à sa tessiture actuelle, sans jamais chercher à tirer à elle la couverture, elle vit sa vengeance dans une sorte d’assomption tragique et théâtrale qui fait froid dans le dos.
Tous étaient fort bien tenus, soutenus, aidés par Claire Gibault qui avait la lourde responsabilité de narrer, sur ses frêles épaules, cette mauvaise blague corse où ne manquait dans ces notes parfois sèches et dures qu’un rien de lyrisme échevelé, de grandeur épique ébouriffante, bref, le goût du vrai sang en quelque sorte.