COTE D'IVOIRE: Elections sanglantes


Par J.N.B.L. Rédigé le 06/12/2010 (dernière modification le 06/12/2010)

Les résultats provisoires ont été proclamés jeudi 2 décembre dans l’après-midi par la commission électorale, donnant la victoire au candidat de l’opposition Alassane Ouattara avec 54,1% des voix, contre 45,9% pour le président sortant Laurent Gbagbo*. Amnesty International condamne le raid armé mené par la gendarmerie, force paramilitaire, contre le siège d’un parti de l’opposition le 1er décembre, dans la ville d’Abidjan en Côte d’Ivoire, qui a fait plusieurs morts et plusieurs blessés.


Le raid s’est déroulé dans les locaux du Rassemblement des républicains (RDR), le parti d’Alassane Ouattara, candidat à l’élection présidentielle qui s’est déroulée dimanche 28 novembre. Plus de 10 personnes ont été arrêtées au cours de l’attaque dans le quartier de Yopougon à Abidjan. On ignore ce qu’il est advenu de ces personnes. "Si les autorités ne condamnent pas ces agissements et ne traduisent pas les responsables présumés en justice, cela reviendra à admettre qu’elles cautionnent cette très grave violation des droits humains", a indiqué Salvatore Saguès, responsable des recherches sur l’Afrique de l’Ouest au sein d’Amnesty International.

Un témoin oculaire blessé lors de l’attaque, qui a préféré garder l’anonymat, a raconté à Amnesty International :
"Il était aux environs de 22 h. Nous regardions la télévision, certains d’entre nous buvaient du thé lorsque l’on a frappé à la porte. Nous n’avons pas ouvert en raison du couvre-feu et quelqu’un nous a ordonné : "Ouvrez la porte ou nous allons escalader le mur et tous vous tuer."
Puis nous avons vu des gendarmes en uniforme et des personnes en civil se mettre à escalader le mur et commencer à nous tirer dessus. Certains gendarmes portaient des casquettes rouges, d’autres des cagoules."

Un autre témoin a rapporté :
"Lorsque j’ai vu les gendarmes, je suis allé me cacher dans les toilettes. Ils ont fracturé la porte et m’ont enjoint de lever les mains en l’air et de m’allonger sur le sol. Alors que j’étais allongé, ils m’ont tiré dessus et j’ai été touché à la jambe. Ils m’ont laissé pour mort."
Selon plusieurs témoignages, au moins deux des victimes ont été abattues par les gendarmes alors qu’elles tentaient de s’enfuir en escaladant la clôture.

Après l’attaque, les gendarmes sont partis, avant de revenir accompagnés de policiers pour emmener les dépouilles des victimes, ainsi que les blessés.
Plusieurs blessés ont été transférés dans un camp de la gendarmerie à Abidjan. Personne n’a eu de leurs nouvelles depuis lors.

Un témoin a confirmé la présence d’un fourgon de gendarmerie juste avant et pendant l’attaque.
"Personne ne saurait justifier le fait que les forces de sécurité abattent des personnes allongées au sol, en leur tirant à bout portant dans le dos", a estimé Salvatore Saguès.

Les attaques surviennent sur fond de nouvelles flambées de violence au lendemain du second tour de l’élection présidentielle qui s’est tenue dimanche 28 novembre.



* Ces résultats ont immédiatement été contestés par le parti du président Gbagbo, qui a considéré qu’il appartenait au Conseil Constitutionnel de donner les résultats définitifs.
Suite à l’annonce des résultats en Côte d’Ivoire et dans la presse étrangère, le Conseil national de la communication audiovisuelle a ordonné la suspension sans délai de la diffusion des chaînes de télévision d'informations étrangères. Les autorités ont également annoncé la fermeture des frontières.
Le second tour de l’élection présidentielle en Côte d’Ivoire avait été reporté à cinq reprises depuis 2005. Cette élection a fait naître l’espoir de tourner le dos à la crise née de l’insurrection armée de septembre 2002, qui a abouti à la partition du pays.





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