Afrique de l'ouest: Les ressources d'eau en question


Par Rédigé le 05/11/2012 (dernière modification le 04/11/2012)

Dans un contexte de boom minier dans la sous-région, les impacts environnementaux notamment les risques de pollution des ressources en eau sont à redouter. Dans cet entretien, le Secrétaire exécutif du Partenariat ouest-africain de l'eau partage avec nous son éclairage de la problématique de l'exploitation minière et ses impacts sur les ressources naturelles. Mais avant, il aborde les risques de rareté de l'eau dans le Sahel et dans la sous-région avant de présenter la Gestion intégrée des ressources en eau (Gire) comme une alternative crédible pour une meilleure gestion de nos ressources.


Photo (c) Alain Tossounon
Dam Mogbanté, Secrétaire exécutif du Partenariat ouest-africain de l'eau: "Il faut que l’exploitation minière prenne en compte les différents plans de gestion intégrée des ressources en eau"

Est-ce que de façon globale les ressources en eau se raréfient en Afrique de l'ouest?

Assurément oui! L’évolution des populations, l’urbanisation et l’augmentation des populations des villes sont des facteurs qui accentuent les pressions sur les réserves en eau. Donc, on peut dire qu’elle se raréfie relativement. Mais, on peut aussi dire que les changements climatiques nous conduiraient à des cas de peu de précipitations ou des cas où il y aura beaucoup d’eaux. Donc, il faut une planification pour une utilisation judicieuse de cette ressource.

Quelle est l’alternative à la rareté de l’eau pour les pays du Sahel?

Nous avons toujours milité pour une Gestion intégrée de la ressource en eau (Gire). C’est un concept qui nous permet de planifier en conséquence et de mettre en place tous les mécanismes organisationnels et de gestion nécessaires à la compréhension de la dynamique de l’eau et à sa connaissance. Il faut connaître la ressource et les besoins pour opérer les meilleures options en pour la gestion de la ressource. Il faut une gestion intégrée de la ressource. Nous parlons de la gestion intégrée de la ressource, ce n’est pas seulement la mise en place d’un cadre nécessaire mais aussi de les suivre et de les appliquer. Lorsque nous avions parlé de l’eau et de l’exploitation minière, il est apparu que les textes sont là mais on ne les respecte pas.

Quelle est votre regard sur la prise en compte de la Gestion intégrée des Ressources en eau (GIRE)?

Il y a des efforts qui sont déployés. Il y a une évolution positive. Nous sommes de ceux qui pensent qu’il faut du temps pour que certaines actions et certaines réformes d’inspiration de Gestion intégrée de la ressource en eau (Gire) pour aboutir. Et, lorsqu’on voit tous les efforts déployés par la CEDEAO, à travers le Centre de coordination des ressources en eau, et lorsqu’on voit dans les pays, la mise en place des plans Gire, et la mise en place de plan de gestion de l’environnement, et même des programmes d’adaptation aux changements climatiques, c’est un ensemble de cadres et de programmes qui permettent de maîtriser et qu’elle permettent un tant soit peu d’aller vers une gestion optimisée. Cela ne va pas aussi vite que nous le souhaitons. Il faut qu'aussi bien les bailleurs que les autorités cessent d’aller en urgence et de faire, à chaque fois, des investissements sans qu’au préalable, on y associe tous ces éléments de gestion intégrée des ressources en eau.

Est-ce qu’il y a urgence à agir par rapport aux conséquences de l’exploitation minière sur la ressource en eau?

Il y a un boom minier qui s’est emparé de la sous-région africaine. On croise un peu partout et on essaie de rechercher de l’or et d’autres minerais. C’est vrai que c’est important pour le développement économique, puisqu’il faut des devises mais en même temps on prendra cette activité dans un contexte général de développement, et l’eau est un intrant important dans la prospection et dans l’extraction, dans la mesure qu’elle rentrent dans le processus. Ce sont des quantités énormes qu’il faut dans des mines. L’eau rentre dans ce processus comme aussi le récepteur final, et une certaine pollution est à prévenir et à maîtriser. Il y a un arbitrage à faire, à l’échelle locale, par rapport à l’agriculture et aux besoins des villes mais aussi pour l’environnement au sens strict du terme de préservation des forêts et des zones humides. Donc, il faut que l’exploitation minière prenne en compte les différents plans de gestion intégrée des ressources en eau.

Quels sont les risques qu’on peut enregistrer au niveau de l’eau face à l’exploitation minière?

Naturellement si on prend l’or, une fois qu’on veut l’exploiter, on exploite d’énormes quantités de terre. Et le minerai même contient des éléments chimiques, notamment souvent l’arsenic si bien que même si on en utilisait pas pour l’exploitation, ces éléments sont déjà une source de pollution. Ensuite, il faut voir le risque d’un point de vue localisé parce que lorsqu’on développe une exploitation minière, les rejets se font à un endroit donné. Donc, c’est plus souvent à cet endroit-là que le problème se pose parce que plus loin en aval, les effets de dilution et d’autres activités qui se mènent diminuent un peu la dangerosité de ce qui est libéré. Mais, sur le coup de l’environnement immédiat des mines, les eaux peuvent se trouver tellement affectées qu’elles ne seront plus propices à l’agriculture, qu’on a du mal à faire l’élevage. Il y a aussi l’aspect des eaux souterraines. On vous dira que dans les études d’impact environnemental, les miniers font tout pour imperméabiliser le sol et faire en sorte que les rejets n’attaquent pas les eaux souterraines. Mais, il faut reconnaître que c’est toujours un risque parce qu’on n’est jamais suffisamment sûr qu’on ne pollue pas la nappe. Or, de plus en plus avec les changements climatiques, les gens vont se porter sur l’exploitation des eaux souterraines pour l’alimentation des villes et même pour l’agriculture. Donc, l’inquiétude se situe exactement à ce niveau. En conséquence, il faut voir la question surtout sur le plan local, dans les environs immédiats des mines qui y sont toujours plus dangereuses. Et si c’est à côté des villes, les risques sont encore plus élevés.






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