ACTUS DE HONGRIE


Par Colette Dehalle Rédigé le 19/07/2009 (dernière modification le 20/07/2009)

Du nouveau à Strasbourg
Où l'on reparle de Nabucco
Une exposition à ne pas manquer
Un mythe qui ne fait plus recette


Photo du jeune Robert Capa prise par Gerda Taro en mai 1937 sur le front ibérique
Du nouveau à Strasbourg

A 34 ans, Ádám Kósa est l'un des 22 nouveaux députés hongrois élus le 7 juin dernier au Parlement européen. Il va siéger dans deux commissions parlementaires, "Affaires sociales et emploi" et "Transports". Sourd-muet, il s'exprime dans la langue des signes et entend bien "prouver qu'une personne sourde peut faire le même travail que ses collègues". Cet avocat de formation qui a présidé pendant cinq ans l'Association hongroise des sourds et malentendants, n'est membre d'aucun parti. Le Fidesz, plus grande formation hongroise d'opposition de droite, arrivé en tête aux élections européennes avec 56,37% des voix et 14 députés, l'avait contacté et il a accepté cette offre, trouvant là l'occasion de pouvoir aider ceux qui souffrent de handicap. Il fait d'ailleurs remarquer qu'un Européen sur dix souffre de déficiences et il n'y a que quatre ou cinq eurodéputés handicapés.
Premier orateur lors du tout premier débat, il a lancé un plaidoyer en faveur du respect des langues des minorités en Europe. Dans cette enceinte où les interprètes sont légion, l'un d'entre eux traduit les signes vers le hongrois alors qu'un autre le fait vers le français, en effet chaque pays a sa propre langue des signes. Un de ses collègues français en a profité pour réclamer la retransmission en direct dans ce langage de tous les débats du Parlement lorsqu'il s'agit des écrans internes. Ádám Kósa constate "Ceux qui me croisent me traitent d'égal à égal, c'est une grande nouveauté par rapport à la Hongrie" et il ajoute que s'il est obligé de laisser sonner le téléphone sans décrocher, il apprécie que les gens le contactent par SMS ou par courriel. Ádám Kósa a révélé que ses parents sont sourds, de même que son épouse et ses deux garçons âgés de 5 et 2 ans. Lui qui connaît si bien les difficultés de ce handicap, il est décidé à "faire avancer les choses", il faut souligner que le Parlement a débloqué un budget pour payer plusieurs interprètes dans le langage des signes.

Où l'on reparle de Nabucco

Ces jours derniers, cinq pays, l'Autriche, la Bulgarie, la Hongrie, la Roumanie et la Turquie ont signé à Ankara un accord pour la construction d'un gazoduc qui approvisionnera l'Europe. Nabucco qui sera une alternative aux livraisons russes qui on l'a vu ces derniers hivers, avaient posé des problèmes, devrait être opérationnel en 2014. Il permettra le transit de 31 millions de mètres cubes annuels de gaz sur 3 300 km, d’Erzurum en Turquie à Baumgarten en Autriche. De cette localité du Burgenland le gaz sera réacheminé vers les 27 pays de l'UE. La Turquie qui a subi elle aussi des ruptures d'approvisionnement du gaz russe arrivant par l'Ukraine, a tout à gagner dans ce projet, particulièrement en ce qui concerne le processus de son intégration. Elle devient donc le pays de transit avec les taxes qui s'y attachent, de 400 à 450 millions d’euros par an, et celui qui assure la sécurité énergétique européenne. La Commission en est si consciente que son président José Manuel Barroso était à Ankara lors de cette signature. "La sécurité énergétique est un des domaines où l'UE et la Turquie ont un intérêt stratégique commun dans une coopération renforcée, dans le contexte de la volonté ferme de l'Europe de diversifier ses approvisionnements et du rôle clé de la Turquie dans ce contexte" a-t-il souligné. Etaient aussi présents dans la capitale turque le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, Richard Morningstar, secrétaire d’Etat américain à l’Energie et l’ancien ministre allemand des Affaires étrangères Joschka Fischer, nouveau conseiller politique de Nabucco. La réalisation de ce projet devrait coûter 7,9 milliards d’euros dont 70% proviendront d’investisseurs externes. Le reste sera à la charge des entreprises concernées, l'autrichienne ÖMV, la hongroise MOL, la roumaine Transgaz, la turque Botas, l'allemande RWE et Bulgarian Energy Holding. La BERD, Banque européenne pour la reconstruction et le développement, et la Banque mondiale pourraient intervenir ainsi que la Commission européenne qui proposera 200 millions d’euros. Avant de vraiment voir le jour, Nabucco aura à s'imposer face à son concurrent South Stream, émanation de Gazprom allié à l’italien ENI, lequel devrait relier la Russie à l'Italie. pour un coût estimé à 4,9 milliards d'euros.

Une exposition à ne pas manquer


Le Lumu, Ludwig Museum of Contemporary Art, de Budapest, sis dans le vaste complexe du Palais des Arts au bord du Danube, présente jusqu'au 11 octobre prochain, une grande rétrospective Robert Capa avec 985 clichés du célèbre photographe. Rachetés par le Musée National Hongrois au Centre International de Photographie de New York, fondé en 1974 par Cornell Capa, son frère cadet, ils furent pris notamment pendant la guerre civile espagnole, au front durant la Seconde Guerre mondiale, lors de la naissance de l’Etat d’Israël et au cours de la guerre d’Indochine où il mourut d'ailleurs tragiquement entre Namdinh à Thaibinh le 25 mai 1954 en sautant sur une mine. Figurent aussi dans cette exposition une cinquantaine de portraits d’artistes tels Picasso, Gary Cooper, Ingrid Bergman, Alfred Hitchcock ou John Steinbeck…
Endre Ernő Friedmann naquit le 22 octobre 1913 à Budapest, il fut d'abord correspondant de l'agence Dephot fondée à Berlin en 1928, et s'installe à Paris en 1933 avant d'émigrer aux USA en 1939. A Paris, il avait rencontré le grand amour de sa vie, Gerda Pohorylle née à Stuttgart le 1er août 1910 dans une famille juive originaire de Galicie, elle aussi photographe. En 1935, ils attirèrent l'attention sur eux en prenant des pseudonymes hollywoodiens, Robert Capa et Gerda Taro, clin d'oeil au réalisateur Frank Capra et à la sublime Greta Garbo. Celui qui sera certainement le plus grand photographe de guerre du XXe siècle fit ses classes en Espagne durant la guerre civile. Gerda Taro y mourra d'ailleurs, à l'hôpital de l'Escorial le 28 juillet 1937 après avoir été écrasée la veille par un char républicain lors de la bataille de Brunete. Son enterrement le 1er août au Père-Lachaise, donna lieu à une manifestation antifasciste. Capa partit alors "couvrir" la seconde guerre sino-japonaise. En 1947, il fonde avec David Seymour, Henri Cartier-Bresson et George Rodger la coopérative photographique Magnum. Tout le monde connaît son soldat républicain mortellement blessé ou ses images du débarquement sur les plages de Normandie aussi bien que les femmes tondues après la Libération et livrées à la vindicte publique. A propos de cette fameuse photo du républicain prise le 5 septembre 1936, on sait depuis longtemps que son authenticité fut souvent mise en doute, elle est soupçonnée d'être le résultat d'une mise en scène. Ces jours-ci encore, le journal catalan El Periódico revenait sur la question, soutenant que Capa avait photographié le soldat dans un endroit où il n'y avait pas eu de combat et citant maintes preuves à l'appui.

Un mythe qui ne fait plus recette

Avant la chute du bloc communiste le jeans était un vêtement chargé de symbole, il était la matérialisation de ce que représentait le monde occidental vu de Moscou, Sofia ou Varsovie. On était prêt à tout pour s'en procurer un. Le porter vous différenciait des autres et on l'achetait sur place à des prix exorbitants si on n'avait pas la chance de se l'être procuré lors d'un voyage ou qu'on vous l'ait offert. Un homme d'affaires hongrois rappelle que ses premiers jeans, italiens de la marque Cassuci, lui furent offerts en 1985 par sa grand-mère, elle les avait payés 1 500 forints, sa propre mère n'en gagnait que 4 500... C'était l'époque où les routiers venant de l'étranger en dissimulaient dans leur cargaison avec l'intention de les revendre au prix fort.
En 1978, en Hongrie qui passait, rappelons-le, pour être la baraque la plus gaie du camp socialiste, il fut décidé de le fabriquer sous la marque «Trapper». Il s'en vendit plus d'un million entre 1980 et 1981. L'arrivée de la marque Lee lui causa quelque tort. Le fabricant de ces jeans hongrois en vend cependant encore dans l'unique boutique qui subsiste à Budapest près du ministère des Affaires étrangères.
Par la suite, Levi Strauss établit une usine à Kiskunhalas, ville de quelque 30 000 habitants à 130 km sud de Budapest, dans le département de Bács-Kiskun. Après de nombreuses négociations menées depuis plusieurs mois, le groupe Tamas Torba Levi Strauss l'a fermée fin juin, licenciant ainsi 549 ouvriers. La surproduction et une baisse de la demande en sont la cause, la situation économique internationale n'arrangeant rien. Le groupe possède par ailleurs deux usines en Pologne et en Turquie qui sont capables d'approvisionner le marché européen. O tempora ! O mores ! Il faut bien reconnaître que cette fermeture n'a guère suscité d'intérêt.


Tags : Hongrie actus



Autres articles dans la même rubrique ou dossier: