A l'aube de 2009, l'Office français de prévention du tabagisme lance un cri d'alarme


Par CP Rédigé le 11/12/2008 (dernière modification le 11/12/2008)

2003 et 2004, avec le lancement du Plan cancer, ont été de fantastiques années de régression du tabagisme et de la maladie tabagique. 2007 et 2008, grâce au décret Bertrand, ont constitué une période décisive pour la prévention du tabagisme passif. Mais 2008 sera la quatrième année consécutive où le tabagisme actif n’aura pas régressé dans l'Hexagone. La fumée du tabac continue de tuer prématurément plusieurs centaines de personnes chaque jour en France. Les mesures pour protéger du tabagisme passif n’ont pas eu d’effet sur le tabagisme actif qui nécessite d’autres initiatives.


Le tabagisme – une maladie chronique – continuera à tuer en 2009 : un fumeur régulier sur deux mourra d’une maladie liée au tabac et perdra vingt années de vie.

L’histoire récente montre pourtant la remarquable efficacité des décisions politiques. Ainsi, le cancer du poumon tue aujourd’hui en France 6 000 personnes de moins chaque année grâce aux mesures prises entre 1991 (vote de la loi Evin) et 2004. Le lancement du Plan cancer en 2003-2004 par le président Chirac et le professeur Mattei, ministre de la Santé, avait eu un effet spectaculaire sur les chiffres de la consommation qui enregistraient alors 1,5 million de fumeurs en moins. Les initiatives prises en 2006 par Xavier Bertrand et Dominique de Villepin sur le tabagisme passif ont donné des résultats tout aussi considérables sur la protection des non-fumeurs.

Pourtant, si les fumeurs acceptent très bien ces nouvelles règles, ils fument toujours autant. Il apparaît clairement qu’en France, comme dans de nombreux pays, l’interdiction de fumer est une étape importante de la lutte contre les méfaits du tabac, mais elle ne constitue qu’une étape et ne règle pas pour autant le problème du tabagisme actif.

Force est de constater que, ces derniers mois, ce n’est plus le ministre de la Santé qui s’exprime le plus sur le tabac, mais le ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique.

54 milliards de cigarettes on été vendues en 2004 ; le volume des ventes pour 2008 sera équivalent.

Plus aucune initiative d’ampleur n’a été prise par le gouvernement pour aider les fumeurs depuis quatre ans ! En 2007-2008, l’INPES a annulé, à la demande du gouvernement, certaines des campagnes de prévention du tabagisme prévues. Les crédits aux associations sont retombés à un niveau très bas et les licenciements économiques s’y succèdent.

Les collégiens n’ont reçu en 2008 que peu de messages de prévention pour leur délivrer les vrais dangers du tabac : les dernières campagnes importantes leur ont été en effet présentées lorsqu’ils étaient encore à l’école primaire. Depuis deux ans, ils se remettent à fumer davantage.


La Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT), un service placé sous l’autorité du Premier ministre, refuse désormais de s’occuper du tabagisme, arguant du manque de crédits. Son président préfère ne s’attaquer qu’aux drogues qui occasionnent des troubles publics (les 66000 victimes du tabac meurent en silence !). Le ministère de la Santé en France emploie pour contrôler le tabagisme vingt fois moins de fonctionnaires que le Québec !

L’OFT exhorte les politiques à agir et à rattraper en 2008 le retard accumulé. Il rappelle que la lutte contre le tabac est un merveilleux investissement pour l’avenir, qu’il ne s’agit pas de prendre en compte un « principe de précaution » mais un danger avéré, prouvé et quantifié par des milliers de publications françaises et internationales d’une fiabilité incontestable. L’efficacité en termes de santé publique est connue de tous ; la rentabilité sur le plan économique est tout aussi évidente et le « retour sur investissement » de l’aide à l’arrêt est effectif : en huit ans, l’investissement rapporte plus qu’il ne coûte selon les études du NICE (National Institute for Health and Clinical Excellence, Grande-Bretagne). La Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT) qu’a ratifiée la France l'oblige à avancer dans ce sens.

Oui, 2009 doit voir la reprise de la baisse du tabagisme ; oui, plusieurs dizaines de milliers de morts prématurées doivent être évitées ! Et ceci est davantage l’affaire des décideurs politiques que des décideurs de santé. Investissons sur l’avenir, investissons dans la prévention du tabagisme !

Dix solutions parmi d’autres pour avancer

1. Augmenter le prix du tabac (une augmentation du prix de vente des cigarettes de 10 % diminue de 4 % la consommation).

2. Instaurer les paquets génériques sans publicité (le paquet reste un objet publicitaire pour les marques de cigarettes).

3. Mettre en place sur les paquets de cigarettes les avertissements sanitaires avec image (pour renouveler l’information, comme cela a été fait en Belgique).

4. Placer les cigarettes sous le comptoir chez les buralistes (pour supprimer l’incitation à l’achat).

5. Prendre en charge l’arrêt du tabac (au moins pour les maladies de longue durée dont l’arrêt du tabac est décrit comme un traitement essentiel par la HAS et pour la grossesse).

6. Reprendre des campagnes TV bien ciblés (pour casser l’image du tabac chez les jeunes en particulier).

7. Financer et promouvoir les actions vers les jeunes (le concours Classes non fumeurs, par exemple).

8. Aider à la prise en compte du tabagisme dans le monde du travail (l’entreprise peut faire plus qu’appliquer la simple interdiction de fumer).

9. Aider à la formation des professionnels de santé (tous sont concernés mais pas toujours formés).

10. Faire du « zéro tabac » une norme sociale pour les femmes enceintes et pour les sujets devant subir une intervention chirurgicale (un investissement très rentable à retour sur la santé effectif dans l’année !).

http://www.oft-asso.fr/





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