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S'il y a bien une phrase qui met mal à l'aise, c'est celle-ci: "J'ai toujours aimé ma femme". Une phrase que l'on entend régulièrement dans les dîners et qui sonne terriblement creux. Pire, une phrase qui effraye car elle fait peur par ce qu'elle sous-entend.
On y perçoit comme une sorte d'habitude, d'obligation, de confort sentimental. Comme si ces mots pouvaient coller avec le sentiment amoureux. Comme il est énervant le héros du dernier livre de Gilles Bornais. Jean-Baptiste n'apparaît pas sympathique aux lecteurs. Pourtant, c'est lui la victime, il a été sans raison, abandonné par son épouse. Pourquoi Mylène qui avait tout pour être heureuse, est-elle partie ainsi, en laissant juste ce mot cruel, "je ne rentrerai pas"? Puisque j'ai toujours aimé ma femme, que je lui ai toujours déclaré - devant les autres surtout, n'est-ce pas - pour bien asseoir cette relation exceptionnellement longue de fidélité et d'engagement.
Pourquoi est-elle partie? Voilà ce que l'on entend dans la quête effrénée de ce mari pour retrouver son épouse disparue sans laisser d'adresse. Le lecteur a vite compris que le dialogue avec un tel homme aurait été impossible et que c'est pour cela que Mylène disparaît, ne laissant aucune possibilité à son époux de la retrouver, pour tenter de la convaincre de revenir.
Lui qui s'est construit une bonne petite vie confortable où tout semblait maîtrisé et solide, voit tout volé en éclats. Cela fait mal, n'est-ce pas? Malgré une situation présentée de prime abord comme une abominable injustice, le lecteur ne peut entrer dans le jeu du mari abandonné. Jean-Baptiste en fait trop et n'apparaît pas comme sympathique avec son incompréhension de son abandon en bandoulière. Il ne comprend pas que les autres ne le comprennent pas, lui pourtant une si parfaite victime de l'inconstance féminin. Puisqu'il lui donnait tout et qu'elle avait tout pour être heureuse, pourquoi est-elle partie?
Mais sympathique, le héros le devient au fil des pages. Lorsqu'il dévoile ses failles, ses faiblesses lorsqu'enfin la vie a prise sur lui, lorsqu'enfin il devient humain. Ce n'est pas sa douleur qui nous le rend sympathique, ce sont plutôt les questions qu'ils acceptent enfin de se poser. Le nouveau regard qu'il pose sur sa femme, qui n'est plus seulement sa femme, mais un être à part entière qui n'a pas forcément besoin de lui pour vivre. Qu'il doit considérer non pas comme sa moitié, mais comme une entité indépendante de ce couple qu'il s'est évertué à fonder tout le long de sa première vie et qu'il doit apprendre à respecter pour ce qu'elle est.
Gilles Bornais, J'ai toujours aimé ma femme, Fayard Roman, 2014
On y perçoit comme une sorte d'habitude, d'obligation, de confort sentimental. Comme si ces mots pouvaient coller avec le sentiment amoureux. Comme il est énervant le héros du dernier livre de Gilles Bornais. Jean-Baptiste n'apparaît pas sympathique aux lecteurs. Pourtant, c'est lui la victime, il a été sans raison, abandonné par son épouse. Pourquoi Mylène qui avait tout pour être heureuse, est-elle partie ainsi, en laissant juste ce mot cruel, "je ne rentrerai pas"? Puisque j'ai toujours aimé ma femme, que je lui ai toujours déclaré - devant les autres surtout, n'est-ce pas - pour bien asseoir cette relation exceptionnellement longue de fidélité et d'engagement.
Pourquoi est-elle partie? Voilà ce que l'on entend dans la quête effrénée de ce mari pour retrouver son épouse disparue sans laisser d'adresse. Le lecteur a vite compris que le dialogue avec un tel homme aurait été impossible et que c'est pour cela que Mylène disparaît, ne laissant aucune possibilité à son époux de la retrouver, pour tenter de la convaincre de revenir.
Lui qui s'est construit une bonne petite vie confortable où tout semblait maîtrisé et solide, voit tout volé en éclats. Cela fait mal, n'est-ce pas? Malgré une situation présentée de prime abord comme une abominable injustice, le lecteur ne peut entrer dans le jeu du mari abandonné. Jean-Baptiste en fait trop et n'apparaît pas comme sympathique avec son incompréhension de son abandon en bandoulière. Il ne comprend pas que les autres ne le comprennent pas, lui pourtant une si parfaite victime de l'inconstance féminin. Puisqu'il lui donnait tout et qu'elle avait tout pour être heureuse, pourquoi est-elle partie?
Mais sympathique, le héros le devient au fil des pages. Lorsqu'il dévoile ses failles, ses faiblesses lorsqu'enfin la vie a prise sur lui, lorsqu'enfin il devient humain. Ce n'est pas sa douleur qui nous le rend sympathique, ce sont plutôt les questions qu'ils acceptent enfin de se poser. Le nouveau regard qu'il pose sur sa femme, qui n'est plus seulement sa femme, mais un être à part entière qui n'a pas forcément besoin de lui pour vivre. Qu'il doit considérer non pas comme sa moitié, mais comme une entité indépendante de ce couple qu'il s'est évertué à fonder tout le long de sa première vie et qu'il doit apprendre à respecter pour ce qu'elle est.
Gilles Bornais, J'ai toujours aimé ma femme, Fayard Roman, 2014